Promenons-nous dans les parcs tant que le loup y est !

Les balades dans les espaces protégés permettent d’interroger notre rapport au « sauvage ».

Claude-Marie Vadrot  • 26 juillet 2012 abonné·es

Avec 140 réserves naturelles nationales (dont 6 en Corse) et 7 parcs nationaux sur le territoire métropolitain, auxquels s’ajoutent 18 réserves dans les DOM-TOM et 3 parcs nationaux outre-mer, la France offre de belles occasions de ne pas bronzer idiot et de découvrir ceux qui luttent au quotidien pour préserver la biodiversité, la flore et la faune (qu’il s’agisse des oiseaux ou des mammifères).

Les 11 réserves gérées par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) sont animées par des conservateurs qui s’efforcent de concilier, comme souvent sur les terrains du Conservatoire du littoral, la préservation et les activités humaines – ostréiculture, élevage, agriculture. Une mention particulière doit être décernée à la réserve de Lilleau-des-Niges, sur l’île de Ré, et à celle du marais d’Yves, entre La Rochelle et Rochefort : dans ces deux espaces naturels ravagés par la tempête Xynthia en 2010, il a fallu reconstituer les troupeaux et, dans l’île de Ré, reconstruire les digues et remettre en route l’activité des paludiers, qui contribuent à entretenir l’espace. En longeant l’immense réserve naturelle de Camargue créée en 1927 par la Société nationale de la protection de la nature, on découvre une richesse d’oiseaux aquatiques unique en France, qui va au-delà des sempiternels flamants roses. On comprend aussi à quel point la lente montée de la Méditerranée remet en cause, en raison de l’augmentation de la salinité de ses eaux, ce site protégé par des scientifiques qui ont mis des années à empêcher les chasseurs d’y faire des cartons faciles. Un secrétaire d’État à l’Environnement y fut même pris le fusil à la main. Parmi les parcs nationaux, celui des Pyrénées fut créé en 1967 par des politiques qui, harcelés par les aménageurs touristiques, « oublièrent » d’y inclure la zone de l’ours brun. Le randonneur aura l’occasion d’évoquer cette question de l’ours avec les bergers. Il y a ceux qui acceptent sa présence en échange de quelques aides matérielles, et ceux, excités par le député du MoDem Jean Lassalle, qui ont déclaré la guerre au plus gros mammifère du territoire français. En 2011, l’animal a tué 176 brebis, et 134 autres ont fait l’objet d’une indemnisation « au bénéfice du doute ». Or, ces dégâts ne représentent même pas 1 % de la prédation sur les troupeaux qui montent en estive, le reste étant le fait des chiens errants.

Même problème dans le parc du Mercantour, dont le tracé, depuis sa création en 1979, doit plus aux exigences des politiques qu’à celles des écologistes. Depuis l’arrivée en 1992 du loup en provenance d’Italie, les bergers, habitués à laisser leurs troupeaux seuls dans la montagne, déplorent des attaques. Une prédation qui, pour toute la France (essentiellement dans l’arc alpin), s’est stabilisée autour de 2 500 animaux d’élevage (contre 150 000 par les chiens), alors que le nombre des loups a augmenté régulièrement. En découvrant ce parc magnifique, et notamment la vallée des Merveilles, on peut recueillir les opinions divergentes des bergers et juger du travail des « aides-bergers » bénévoles recrutés chaque été par l’association Férus. Ces réserves et ces parcs offrent l’immense plaisir de balades et l’occasion d’interroger notre rapport au « sauvage » et à sa nécessaire protection.

Écologie
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