À flux détendu

Christophe Kantcheff  • 6 septembre 2012
Partager :

Je me suis retrouvé coincé samedi soir devant le prime time de TF1. Impossible de demander à mon hôte d’éteindre son poste : bien que seules les informations et la météo recueillent son attention, la télé est chez lui comme une invitée perpétuelle. Celle-ci en a profité pour imposer sa désagréable présence au cours de notre dîner. TF1, donc, vers 20 h 45, un samedi. L’émission s’appelle : « Qui sera le meilleur… ce soir ? » C’était, en l’occurrence, une « spéciale enfants ». Ceux-ci devaient chanter, danser ou jouer de la musique et être départagés par un jury de « professionnels » (des géants du spectacle tels qu’Hélène Ségara ou Mathieu Madénian…), le tout sous la férule d’un animateur d’une rare élégance, Christophe Dechavanne.

Premier principe de haute civilisation : on met les gosses en compétition. Comme le dit la com’ de l’émission : « Ces jeunes artistes de demain vont s’affronter lors de face-à-face […]. Ils sont prêts à tout pour être le meilleur. » « S’affronter », « prêts à tout », les mots sont choisis. Deuxième principe : l’humiliation. Les enfants retoqués devant quelques millions de téléspectateurs sont sous le coup d’une impitoyable violence symbolique. Pour pimenter la chose, les pleurs sont interdits. Sauf que, samedi, un des petits n’a pu retenir ses larmes. Dechavanne s’est précipité sur lui pour cacher l’incident, qui souillait la pureté du « concept ».

TF1 exhibait samedi soir ses « singes savants », garçons et filles grimés en adultes, les filles surtout, auxquelles on avait demandé de mimer des poses suggestives dans des accoutrements ad hoc. Dire que ce sont les artistes contemporains qu’on accuse d’incitation à la pédophilie !

TF1, un samedi soir. Je me doutais que ce ne serait pas beau à voir. Mais toutes mes craintes ont été dépassées. La chaîne prétend diffuser un divertissement populaire, alors qu’elle tutoie l’élite dans l’abjection.

Culture
Temps de lecture : 2 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Palais de la découverte : la culture scientifique dans la ligne de mire du gouvernement
Science 25 juin 2025

Palais de la découverte : la culture scientifique dans la ligne de mire du gouvernement

L’emblématique musée scientifique parisien est au cœur d’une crise, après le report de sa réouverture, initialement prévue pour le 11 juin 2025. Les attaques contre le secteur culturel se multiplient, sans épargner la culture scientifique.
Par Thomas Lefèvre
« Comme la classe moyenne, le cirque se paupérise »
Entretien 25 juin 2025 abonné·es

« Comme la classe moyenne, le cirque se paupérise »

Jongleur, metteur en scène et directeur du Sirque à Nexon, dans le Limousin, Martin Palisse alerte sur l’effondrement de soixante ans de structuration de son champ artistique. Il en appelle à une réflexion sur les modèles de production.
Par Anaïs Heluin
Austérité : le spectacle vivant entre peurs et résistances
Enquête 25 juin 2025 abonné·es

Austérité : le spectacle vivant entre peurs et résistances

Dans un contexte de coupes budgétaires sévères de la part de l’État et des collectivités territoriales, nombre de comédiens, musiciens, circassiens, etc. doivent réduire leurs activités. Ils alertent sur l’urgence de défendre la notion de service public de la culture, menacée de disparition.
Par Anaïs Heluin
Danse : Mathilde Monnier, l’art du partage
Danse 25 juin 2025 abonné·es

Danse : Mathilde Monnier, l’art du partage

La grande figure de la danse contemporaine présente Territoires à Montpellier Danse puis s’engage ensuite dans Transmission impossible au Festival d’Avignon. Deux projets collectifs ­vecteurs d’une forme très vivante de pédagogie.
Par Jérôme Provençal