Jean-Vincent Placé : « À quand la fermeture de Fessenheim ? »

Jean-Vincent Placé, principal artisan de la stratégie écologiste, relativise la portée des dissensions avec le gouvernement.

Patrick Piro  • 6 septembre 2012 abonné·es

Selon Jean-Vincent Placé, la liberté d’expression des parlementaires et de la direction d’EELV n’est pas remise en cause par la participation de son parti au gouvernement. De ce dernier, il attend des actes, plus déterminants que de simples déclarations.

Depuis quatre mois, les positions écologistes ont été malmenées à plusieurs reprises au sein du gouvernement. Est-ce préoccupant ?

Jean-Vincent Placé : Il est bien trop tôt pour un bilan, que nous établirons à mi-mandat. Certes, il y a eu des points de divergence. J’ai parfois exprimé mon mécontentement, notamment sur l’arbitrage en faveur des forages pétroliers de Shell au large de la Guyane. De même, le signal donné par la baisse du coût des carburants ne va pas dans le bon sens. Cependant, je n’ai pas de critique à formuler sur la méthode gouvernementale pour le moment. Nos ministres sont membres d’une équipe socialiste où s’expriment des options productivistes et sécuritaires, le rapport de force ne nous est pas favorable et nous le savons. En contrepartie, nous défendons l’expression libre de nos parlementaires et de la direction du parti. Notamment sur le dossier du pacte budgétaire européen [le TSCG], où nous estimons inutile la pression des socialistes à notre endroit alors qu’ils disposent d’une majorité très nette pour le faire ratifier, grâce à l’appui de la droite.

Quelle est la ligne à ne pas dépasser dans vos divergences avec la politique gouvernementale ?

Je ne fais guère cas de l’agitation verbale d’Arnaud Montebourg et d’autres, favorables au nucléaire et aux gaz de schiste, par exemple. Je m’en tiens aux actes du Premier ministre et du Président. Si la situation devient intolérable, nous aviserons. Mais ce n’est pas le cas aujourd’hui. Par ailleurs, les premiers signes donnés par le gouvernement sur la politique budgétaire et sociale sont positifs.

Avec deux ministres EELV seulement, il est difficile de peser sur les politiques publiques…

Ce chiffre est sans importance, le PS a la majorité absolue à l’Assemblée nationale. À ce stade, je valide donc la stratégie que nous avons adoptée : nous sommes plus forts et plus audibles grâce à notre participation au gouvernement, où nos ministres travaillent bien et nous livrent beaucoup d’informations institutionnelles, tout en étant porteurs d’une parole indépendante à l’extérieur. Je suis un parlementaire à l’aise, et je n’adhère pas à la position post-révolutionnaire d’un Jean-Luc Mélenchon.

Quels gages escomptez-vous du gouvernement lors de la conférence environnementale ?

C’est un rendez-vous très important. J’en attends, entre autres, un calendrier de réalisation des promesses de François Hollande. Ainsi, à quand la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim ? Nous interpellerons aussi les socialistes. Ils ont signé avec nous – sous la houlette de Michel Sapin, aujourd’hui ministre – un accord prévoyant la diminution à 50 % de la part du nucléaire et la fermeture de 24 réacteurs d’ici à 2025 : quelles dispositions, et à quelle échéance, pour engager le processus ? Pour les gaz de schiste, nous rappellerons que Jean-Marc Ayrault a présenté en juillet 2011 une proposition de loi radicale visant à interdire toutes explorations et exploitations, ainsi qu’à abroger les permis exclusifs déjà octroyés. Nous serons aussi très vigilants sur le vote du pacte budgétaire européen et la loi de finances 2013. François Hollande s’est engagé à démanteler les niches fiscales et à éliminer les subventions directes aux énergies fossiles : il y a 30 milliards d’euros à récupérer pour le budget annuel du pays !

Publié dans le dossier
Les Verts face à leurs contradictions
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