Québec : Une victoire de la « révolution érable »

Le résultat du Parti québécois aux législatives consacre le succès du mouvement étudiant contre le gouvernement libéral.

Denis Sieffert  • 13 septembre 2012 abonné·es

Les indépendantistes du Parti québécois (PQ) ont remporté, le 5 septembre, les élections législatives, provoquant la chute du Premier ministre ultralibéral Jean Charest. Ce résultat sonne comme une victoire du mouvement étudiant, « la révolution d’érable », qui depuis le mois de janvier s’était mobilisé contre une hausse de 75 % sur cinq ans des frais d’inscription universitaire. Les manifestations n’avaient cessé de gagner en ampleur, et le gouvernement libéral n’avait su leur opposer que la répression. L’adoption d’une loi « anti-grève » avait en réalité contribué à renforcer les rangs des manifestants, rejoints par d’autres couches de la société. Ce conflit est sans aucun doute à l’origine de la défaite des libéraux, la campagne des législatives tournant de plus en plus au référendum anti-Charest. Ce qui limite la portée de la victoire du Parti québécois. Celui-ci n’a d’ailleurs remporté que 54 des 125 sièges de l’Assemblée de la « Belle Province ». Il est condamné à former un gouvernement minoritaire, et contraint à des alliances.

Il est donc hasardeux d’analyser ce scrutin comme une victoire des souverainistes. Sa principale dirigeante, Pauline Marois, qui devient la première femme Premier ministre du Québec, s’est d’ailleurs gardée de faire la moindre allusion à l’indépendance que souhaitent, selon un sondage, un tiers des électeurs du PQ. Cela n’a pas empêché Marine Le Pen de « saluer avec fierté » ce résultat qui, dit-elle dans un message, « illustre le progrès des idées souverainistes partout dans le monde ». C’est évidemment entretenir un quiproquo. Le souverainisme québécois est né d’un mouvement anticolonial contre la mainmise anglophone. Il est difficile de l’amalgamer avec des mouvements chers au Front national, comme la Ligue du Nord, en Italie. Le Parti québécois est d’ailleurs un parti social-démocrate, dit de centre-gauche. Lors du référendum de 1995, les indépendantistes avaient manqué de peu la victoire, le « non » l’emportant avec 50,58 % des suffrages. Le « oui » avait obtenu près de 60 % des voix des francophones, alors que les anglophones du Québec, ainsi que les populations autochtones, Inuit et Cris, des montagnes Rocheuses, avaient fait pencher la balance du côté du rejet de l’indépendance. Avec le résultat du 5 septembre, ** plus serré que ne le prévoyaient les sondages, il est donc peu probable que Pauline Marois se lance dans une nouvelle aventure indépendantiste. La question sociale étant de toute façon au premier plan des préoccupations des Québécois. Ce qui explique aussi le bon score (6 %) du parti écologiste et altermondialiste Québec solidaire, qui obtient deux élus. En attendant, l’un des premiers gestes du nouveau Premier ministre a été d’annoncer l’annulation de la hausse des droits universitaires. Mais on ignore si Pauline Marois a jugé utile de remercier Marine Le Pen pour son message…

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