François Sauvagnargues (Fipa) : « La télé peut rivaliser avec le cinéma »

Le délégué général du Fipa dresse un panorama de la production actuelle et de ses enjeux.

Jean-Claude Renard  • 31 janvier 2013 abonné·es

Nommé cette année à la tête du Fipa, François Sauvagnargues a été le directeur de la fiction sur Arte. Il est notamment à l’origine de séries comme Xanadu, Borgen, plus récemment Ainsi soient-ils, ou encore, prochainement, Odysseus.

Vous avez visionné plus de 800 films, pour en sélectionner une centaine. Qu’est-ce qui distingue la fiction française de la production étrangère ?

François Sauvagnargues : La fiction étrangère offre une plus grande variété d’approches et de thématiques, avec des moyens plus importants. Elle présente une plus grande liberté et une facture plus créative, qu’il s’agisse de la fiction anglaise, scandinave ou israélienne. La fiction française est plutôt comparable à l’allemande : une production importante, beaucoup de comédies, de thématiques sociétales et, de temps en temps, de grosses machines. En tout cas, le Fipa permet de battre en brèche une vision répandue qui voudrait que la télé soit une offre dévaluée. Certaines œuvres peuvent rivaliser tranquillement avec ce qui est proposé au cinéma, tout en ayant des moyens de production plus faibles, la différence de budget étant de 1 à 5.

Des Anonymes à la Dernière Campagne, il semble se dessiner une tendance de la fiction française à puiser dans l’histoire politique contemporaine.

Pour Canal +, c’est une politique avérée depuis quelque temps, comme en témoigne le film sur Yann Piat. Sur France Télévisions, cela semble en effet nouveau, après la série les Hommes de l’ombre, maintenant avec la Dernière Campagne ou Crime d’État, sur l’affaire Boulin. La politique n’est plus un sujet tabou qui n’intéresserait pas le public. C’est ce que je défendais déjà à Arte, avec une série comme Borgen.

Beaucoup d’œuvres projetées au Fipa ne sont pas acquises par les chaînes françaises. C’est le cas des films récompensés ces deux dernières années par le prix Michel-Mitrani, pourtant remis par France Télévisions. N’est-ce pas une hypocrisie ?

C’est véritablement un problème. Le président de France Télévisions a engagé ses troupes à y remédier. On verra bien. Il n’y a aucune raison à ce qu’un film excellent ne soit pas diffusé. Est-ce parce les responsables des chaînes sont aujourd’hui sous la coupe de responsables d’études ? Il y a une logique de chaînes qui n’est pas toujours une logique de programmes…

La multiplication des chaînes n’a pas non plus favorisé la diffusion des œuvres.

Les diffuseurs voient en effet d’un mauvais œil les œuvres qu’elles ont financées leur faire concurrence quand elles sont rediffusées ailleurs, d’autant qu’elles marchent parfois mieux la seconde fois. Une autre interrogation porte sur les obligations : les chaînes qui apparaissent ne doivent pas être seulement des chaînes de rediffusion mais s’engager dans la production. Propos recueillis par Jean-Claude Renard

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