#mot-dièse ou l’art du néologisme inutile
Après la «frimousse», la «baladodiffusion» et le «gratuiciel», la Commission générale de terminologie et de néologie (CGTN) a encore frappé : «Mot-dièse» doit remplacer le «hashtag».
Pour oublier un temps les cruelles réalités de ce monde, parlons un peu terminologie et néologisme. Un art de l’adaptation de la langue et du mot ad hoc où notre Commission générale de terminologie et de néologie (CGTN) excelle. Sauf qu’en matière de néologismes informatico-communicationnels, elle donne fréquemment dans le bug … pardon dans le bogue.
Dernier exemple en date, tout frais publié au Journal officiel , le « mot-dièse ». Kesako ? C’est la traduction du hashtag , défini comme une « suite signifiante de caractères sans espace commençant par le signe #, qui signale un sujet d’intérêt, et […] insérée dans un message par son rédacteur afin d’en faciliter le repérage » . « En cliquant sur un mot-dièse, particulièrement répandu dans les réseaux sociaux , précise l’honorable CGTN, le lecteur a accès à l’ensemble des messages qui le contiennent. » On notera qu’elle s’abstient de toute publicité (illégale chez nous) pour Twitter, qui a popularisé ce signe, jusque-là surtout connu des informaticiens.
Erreur ! Comme le souligne Wikipedia version anglaise, ne pas confondre le # (ou number sign ) avec le dièse musical ou sharp sign, introuvable sur un clavier standard dont les barres verticales sont obliques à gauche) ni le caractère chinois 井 (l’eau du puit), ni le numero sign (comme #1, qui se lit numéro 1).
Les Anglais l’appellent hash , et la touche du téléphone correspondante, hashkey . Les Américains, eux, le nomment pound sign , et la touche du téléphone, pound key.
En France, on dit dièse pour le signe # et la touche de téléphone idoine, alors que le dièse s’écrit avec deux barres verticales penchées à gauche et non à droite.. Nos cousins québécois ont choisi de le traduire par « mot-clic », et en Chine on dit cross ou jing parce qu’il ressemble au caractère 井. Vous l’avouerez, tout cela est pour le moins confus et peu homogène.
« Alors que j’étais en causette sur notre anneau de sites, échangeant des frimousses avec mes copains à l’aide d’une appliquette Java, l’un d’eux me transmis curieusement son courriel -dupontdurand(arobe)***.fr- Etait-ce un fouineur de première ? Un lâche arroseur ? Aussitôt dit, aussitôt fait, en pleine zone d’accès sans fil, j’activais ma barrière de sécurité sur mon ASFI et un filtre anti-pourriel même contre les messages multimédias. Ainsi à l’abri, j’ai pu enfin tranquillement siroter une grenadine limonade devant un disque numérique polyvalent tout en écoutant la Marseillaise. »
Mais revenons à nos experts de la CGTN – 16 universitaires, linguistes, inspecteurs généraux des mines ou des finances (si, si !) et académiciens – qui, depuis 1996, élaborent « une terminologie de référence » pour la « mettre à la disposition des professionnels et du public » et enrichir la langue française. Certes, leur travail est utile et nécessaire ; certes, le secteur abuse du jargon anglais, mais modifier le langage professionnel impose un minimum de concertation et beaucoup de bon sens. Petit florilège de plantades : le couriel (mail) est en retard ; le hameçonnage (fishing) est tombé à l’eau ; la baladodiffusion (podcast), le partagiciel (shareware), le logiciel médiateur (middleware), le gratuiciel (freeware) et le démon de messagerie (mailer daemon) font doucement rigoler. Et je ne parle même pas des désopilants arrosage (spamming), Appliquette (Applet), causette (chat), frimousse (smiley), et des inénarrables fouineur (hacker) et ramdam (buzz). Quant aux test de reconnaissance humaine (captcha), disque numérique polyvalent (DVD ), flux de dépêches (really simple syndication [RSS] ou RSS feed), registraire (registrar), domaine de tête (TLD, top level domaine), ordiphone ou terminal de poche (pour PDA) ou encre en poudre (toner), leur avenir semble forclos.
Pour finir, petit conseil aux experts amha (à mon humble avis) : favoriser le mode opt-in (option d’adhésion), plutôt que le opt-out (option de retrait). Sur le Web La base française Francetermehttp://franceterme.culture.fr/FranceTerme/recherche.html La délégation générale de la langue françaisehttp://www.culture.gouv.fr/culture/dglf/ressources/ressources_termino.htm La CSTIC http://ensmp.net/cstic/
Petite concaténation de néologismes savoureux signée Marc Rees (lien sur l’auteur) http://www.pcinpact.com/news/76419-terminologie-francaise-il-n-y-a-plus-crawler-ou-live-cd-en-france.htm ) « Alors que j’étais en causette sur notre anneau de sites, échangeant des frimousses avec mes copains à l’aide d’une appliquette Java, l’un d’eux me transmis curieusement son courriel -dupontdurand(arobe)***.fr- Etait-ce un fouineur de première ? Un lâche arroseur ? Aussitôt dit, aussitôt fait, en pleine zone d’accès sans fil, j’activais ma barrière de sécurité sur mon ASFI et un filtre anti-pourriel même contre les messages multimédias. Ainsi à l’abri, j’ai pu enfin tranquillement siroter une grenadine limonade devant un disque numérique polyvalent tout en écoutant la Marseillaise. »
**Sur le Web
**
-La base française Franceterme[
->http://franceterme.culture.fr/FranceTerme/recherche.html
]
–La délégation générale de la langue française
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