Verbatim : Le « sérieux » selon Emmanuel Maurel

L’aile gauche du PS relève une « évolution du discours »  et suggère de faire « encore un effort ».

Michel Soudais  • 18 avril 2013 abonné·es

La multiplication des discours contre l’insupportable austérité européenne imposée par les conservateurs européens a fait réagir Emmanuel Maurel. Dans son intervention à la tribune du conseil national, le chef de file de Maintenant la gauche, un brin moqueur, a enregistré « avec beaucoup de satisfaction [cette] évolution sensible du discours » du PS. Il a toutefois invité ses camarades à faire « encore un effort » pour « deux écueils »  : « Le premier écueil, c’est d’expliquer qu’il y a une différence entre sérieux et rigueur, entre austérité et rigueur. Cette différence, franchement, je la trouve un peu spécieuse. Quand on coupe dans les dépenses publiques, quand on supprime massivement les dotations aux collectivités locales, quand on envisage de couper dans les dépenses sociales – désindexer les retraites ou parler des allocations familiales, c’est bien ce qu’on fait –, on peut toujours dire que ce n’est pas de la rigueur mais du sérieux… J’ai l’impression que c’est rigoureusement la même chose et que c’est surtout sérieusement risqué […].

» Le deuxième écueil ou élément de langage que je remets en question* […], c’est de dire : « L’austérité en Europe, ce n’est plus possible », « il faut une réorientation majeure de la construction européenne »… *Et en même temps ne jamais faire le lien entre cette politique européenne et la politique que nous menons en France, c’est-à-dire condamner l’austérité pour nous exonérer d’avoir une réflexion approfondie et sérieuse sur la politique que nous menons ici, en France. Or les deux sont liées. Et elles le sont tellement que c’est parce que nous avons ratifié le traité Merkozy que nous nous sommes enfermés dans la seringue des 3 %. » Être sérieux, je suis d’accord. Mais être sérieux, c’est reconnaître que les politiques d’austérité menées partout en Europe ne font reculer ni la dette ni le déficit. Être sérieux, c’est constater en revanche que dans ces mêmes pays le pouvoir d’achat a plongé, que le chômage explose, que la précarité s’aggrave. Être sérieux, c’est voir que toutes les prévisions de croissance de la Commission européenne et les nôtres ne sont pas réalisées. Être sérieux, c’est constater qu’en 2013 nous allons avoir une croissance nulle. Être sérieux, c’est observer que pour la première fois en France depuis bien longtemps le pouvoir d’achat est en baisse, que la consommation s’effondre.

Être sérieux, c’est aussi avoir la lucidité de constater que le fameux pacte de compétitivité, le cadeau que nous avons fait aux entreprises, pèse sur nos finances publiques, avec un gain en terme d’emplois plus qu’hasardeux. Être sérieux, c’est regarder la réalité de la politique de la rigueur, de constater lucidement que plus nous coupons dans les dépenses publiques, plus nous envisageons de couper dans les dépenses sociales, moins les chances de revenir à la croissance sont importantes. Être sérieux,* […] c’est donc être réaliste, être rigoureux, et oser le débat sur la relance. » Nous ne sommes pas au gouvernement […]. Nous les militants socialistes, nous avons le devoir de l’ouvrir, […] ne nous autocensurons pas. […] Rendez-vous compte qu’on n’ose même plus, nous socialistes, parler de hausses de salaires alors que c’est notre identité, c’est notre histoire, c’est nos combats. Vous croyez qu’on sera réélus au terme de ce quinquennat s’il n’y a pas eu d’augmentation salariale pour les plus modestes ? »

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