Fini la vacance ?

Aux réquisitions, Cécile Duflot préfère l’instauration d’une garantie de paiement des loyers.

Ingrid Merckx  • 6 juin 2013 abonné·es

« Je l’ai dit à mes amis de Jeudi noir, la réquisition n’est pas la solution », glissait Cécile Duflot au mois d’avril. Selon la ministre du Logement, il y aurait 2 millions de logements vacants, dont 70 000 en Île-de-France. Rapporté aux 3 millions de mal-logés, cela ouvre quand même des perspectives. « Notre but n’est pas de réquisitionner, mais de faire en sorte que les logements ne soient plus vides, a-t-elle précisé sur Europe 1. Nous avons créé différents moyens, comme la hausse de la taxe sur les logements vacants, la garantie universelle des loyers ou les réquisitions. » La procédure de réquisition, qui se veut donc une solution parmi d’autres, « n’est ni une menace ni une posture idéologique, précise son ministère. Mais un moyen à la disposition de l’État pour signifier que, à l’heure où tant de Français ont des difficultés à se loger, les bâtiments, qu’ils appartiennent à des banques, des compagnies d’assurances, des grandes SCI ou des entreprises, ne doivent plus rester vides. » En décembre 2012, Cécile Duflot avait appelé à un « choc de solidarité ». Depuis, seuls 31 dossiers de réquisition auraient abouti. Les obstacles juridiques sont tels que les procédures traînent en longueur. Sur les 5 053 logements examinés par les services de l’État, 4,5 % ont été démolis, 5 % se sont révélés être des bureaux ou des commerces, 7,5 % étaient vétustes. Mais 75 % d’entre eux seraient en train d’être remis sur le marché…

La taxe sur les logements vacants est encore trop basse pour être dissuasive. La botte secrète de la ministre reste la « GUL » (Garantie universelle des loyers), sorte de sécurité sociale du logement. Parmi les volets majeurs du projet de loi sur l’urbanisme et le logement, qui doit être présenté le 26 juin en Conseil des ministres, la GUL fonctionnerait comme une mutuelle généralisée dans laquelle l’État, ou un tiers, se porterait garant. Ainsi, tous les locataires se vaudraient devant un propriétaire, ce qui aurait pour effet de faire baisser la surenchère sur les garanties à présenter et sécuriserait les bailleurs.

L’idée de départ, c’était de débloquer l’accès des jeunes au logement. « La ministre a souhaité que le dispositif soit le plus large possible », confie-t-on à son cabinet. Il devrait donc pouvoir s’étendre aux précaires et aux sans-domicile en mesure de payer un loyer. Il servirait aussi de filet de sécurité en cas de perte d’emploi, de maladie, d’accident, etc. En effet, 70 % des impayés sont dus à des baisses de revenus, révèle une étude de l’Agence nationale pour l’information sur le logement (Anil). Objectif du dispositif : lutter contre la vacance. Si les propriétaires n’ont plus peur des impayés, ils devraient remettre leurs biens sur le marché. Reste à savoir comment tout cela sera financé. À trois semaines de la présentation du projet, cette partie était encore à l’étude. D’après le ministère, la facture de la couverture des impayés des locataires de bonne foi s’élèverait à 500 millions d’euros. Parmi les solutions examinées : faire payer une cotisation de 1 % à 2 % sur le loyer ou rendre obligatoire une assurance sur les impayés pour les propriétaires. Des verrous devraient permettre d’éviter que des locataires, se sentant « couverts », cessent de payer. Un dispositif d’assurance existe déjà : la Garantie universelle des risques locatifs (GRL). Mais elle n’est pas obligatoire, engendre un surcoût, et le nombre d’assureurs conventionnés est restreint. En outre, elle ne protège que les propriétaires, alors que la GUL entend apaiser l’ensemble des rapports locatifs. Mais la forme qu’elle va prendre est encore mystérieuse.

Société
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