L’ADN déclaré non brevetable aux États-Unis

La Cour suprême américaine met fin au monopole de Myriad Genetics, laboratoire qui était le seul à pouvoir dépister cancers du sein et de l’ovaire.

Ingrid Merckx  • 14 juin 2013
Partager :

« L’ADN produit naturellement est un produit de la nature** et n’est pas éligible pour un brevet, simplement parce qu’il a été isolé »* , a tranché la Cour suprême des États-Unis, le 13 juin. Une décision importante pour la haute cour qui fixe ainsi le statut des gênes humains. S’ils avaient été considérés comme des découvertes scientifiques, ils étaient brevetables.

C’est le cas pour les gènes BRCA1 et BRCA2, impliqués dans les cancers de l’ovaire et du sein, comme l’a rappelé la récente affaire sur la mastectomie (ablation des seins) de la comédienne américaine Angelina Jolie. Ces gênes ont été brevetés par le laboratoire Myriad Genetics, qui est ainsi le seul à pouvoir pratiquer des tests de dépistage de ces cancers. Une situation de monopole contestée en justice par le gouvernement américain et l’ACLU, association de défense des libertés civiles.

Seul l’ADN synthétisé, soit produit, sera brevetable. Le débat sur la brevetabilité du vivant n’est pas nouveau aux États-Unis : déjà 20 % des 24 000 gênes humains y font l’objet d’un brevet. En Europe, une directive de 1998 autorise le brevetage des gênes, « à condition que leur utilité médicale ait été prouvée. » En France, c’est la non-brevetabilité du vivant qui prévaut.

Cette décision fait exploser le monopole de Myriad Genetics, par qui les laboratoires français et européens étaient obligés de passer pour réaliser des tests. Or, ils étaient trois fois plus couteux mais aussi moins fiables que ce que le service public, comme l’Institut Curie, propose. C’est donc la logique de privatisation des gênes que la Cour suprême américaine vient de faire tomber. De quoi ouvrir des perspectives en matière de recherche et d’accès aux tests génétiques. Cela ne résout pas pour autant l’intégralité du débat, notamment concernant le développement des tests génétiques.

Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

« J’aimerais qu’on combatte le système qui rend les étrangers fous »
Témoignage 18 décembre 2025 abonné·es

« J’aimerais qu’on combatte le système qui rend les étrangers fous »

À l’occasion de la Journée internationale des migrants ce 18 décembre, des collectifs appellent à une grève antiraciste, la « Journée sans nous ». Politis a rencontré Ousmane, sans-papiers guinéen. Il raconte la mécanique d’un système « qui profite des sans-papiers » et les pousse à bout.
Par Pauline Migevant
« Le mérite existe-t-il ? » : notre sélection pour aller plus loin
Sélection 17 décembre 2025

« Le mérite existe-t-il ? » : notre sélection pour aller plus loin

Une sélection de la rédaction de Politis, pour compléter la lecture du numéro spécial « Vouloir n’est pas pouvoir. Le mérite extiste-t-il ? », à retrouver sur la boutique en ligne ou sur le site du journal.
Par Politis
Kaoutar Harchi, Dylan Ayissi : « Le mérite est une notion piège »
Entretien 17 décembre 2025 abonné·es

Kaoutar Harchi, Dylan Ayissi : « Le mérite est une notion piège »

Dans un entretien croisé, l’autrice et sociologue et le président de l’association Une voie pour tous remettent en question la notion de mérite dans un système scolaire traversé par de profondes inégalités.
Par Kamélia Ouaïssa et Hugo Boursier
Les oubliés de la République et la cuillère d’argent
Politique 17 décembre 2025 abonné·es

Les oubliés de la République et la cuillère d’argent

Lundi 8 décembre, les candidats à la mairie de Paris ont été auditionnés par des personnes précaires. Croyant dur comme fer à la méritocratie, David Alphand, co-directeur avec Rachida Dati du groupe Changer Paris, a pris plusieurs cartons rouges.
Par Pauline Migevant