Du bon usage du départ de Noël Mamère

Le coup de gueule très médiatique du député-maire de Bègles, qui vient d’annoncer son départ d’Europe écologie-Les Verts (EELV), sert les intérêts de l’aile gauche du parti. Le congrès de novembre s’annonce de plus en plus incertain pour l’actuelle majorité.

Patrick Piro  • 26 septembre 2013
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Du bon usage du départ de Noël Mamère
© *Photo: CITIZENSIDE.COM*

Le député-maire de Bègles vient d’annoncer son départ d’Europe écologie-Les Verts, parce que, dit-il dans un entretien au Monde , il « ne reconnaît pas son parti (…) prisonnier de ses calculs et de ses clans » . Depuis des semaines, voire des mois, Noël Mamère traînait sa grogne. En août, elle était même devenue avant-coureuse de son clash, quand il avait séché les journées d’été de son parti parce que « tout était déjà décidé d’avance pour le congrès » de novembre prochain.

Le renoncement de Pascal Durand à briguer sa succession au poste de secrétaire national, qu’il décrit comme une mise à la porte par « la firme » — Cécile Duflot et ses amis —, lui a donné l’occasion qu’il fallait pour claquer la porte, quinze ans après son arrivée chez les Verts : il pourra refuser de voter le budget 2014 sans froisser ses anciens camarades, et il n’aura plus de comptes à leur rendre pour conserver son double mandat électif, en résistance depuis son arrivée chez les Verts pour ne pas se plier à la règle interne de non-cumul des mandats.

Épiphénomène ?

Mais la décision de Noël Mamère ne sert pas que sa conscience et ses intérêts personnels. Par sa théâtralité, elle excite la sphère médiatique, où l’ancien journaliste reste très apprécié pour son franc parler, et remet le parti en ébullition. L’aile majoritaire – dont Pascal Durand avait les faveurs –, décrit ce divorce comme un épiphénomène. Ainsi Dominique Voynet, qui expédie la chose d’un tweet malin :

De l’autre côté, on s’en donne à cœur joie. Cohn-Bendit s’effare volontiers du « clanisme » et des « couples terrifiants [entendre : Duflot-Placé] qui règnent sur EELV » . Pour le sénateur Jean Desessard, qui signera une motion d’opposition à la majorité, au congrès, « on nous impose le clanisme, le chacun pour soi, la discipline et la stabilité » . Hidalgo l’invite à rejoindre les rangs du PS, et Mélenchon fait pratiquement de même pour le compte du Parti de gauche.

Il fera chaud au congrès

Au bout du compte, c’est l’aile gauche d’EELV qui boit du petit lait. Sa motion LMP (La motion participative) s’appuie sur deux grandes revendications : un bilan sans concession de la participation gouvernementale — avec des lignes rouges à ne pas franchir —, et l’instauration d’une vraie démocratie interne.

Les derniers reculs du couple Hollande-Ayrault sur les questions écologiques (et que n’auront guère apaisé la conférence environnementale) renforcent la première demande s’il en était besoin. Et la publicité donnée à l’épisode Durand-Mamère leur sert sur un plateau une mise en scène inespérée de leur seconde exigence, la plus délicate à argumenter auprès du public écolo. Le congrès, qui semblait plié pour la majorité il y a un mois à peine, s’annonce désormais des plus incertains.

Politique
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