Qui veut faire l’amour en boîte ?

Channel Four convie des couples à des ébats en plateau… à l’abri d’une hypocrite « sex box ». Bientôt à la télé française ?

Jean-Claude Renard  • 17 octobre 2013 abonné·es

Toujours plus loin. C’est le mot d’ordre de la télé-réalité. Channel Four inaugure aujourd’hui un programme spectaculaire : l’un après l’autre, des couples sont invités à faire l’amour dans une grosse boîte de 10 m2, la « sex box », « propre et insonorisée », installée sur le plateau. À l’abri des caméras, donc. Durée des ébats : trente minutes (douche comprise ?), pas plus (comme disait Desproges aux éjaculateurs précoces, « les meilleurs partent les premiers » ). Pendant ce temps, ça glousse, frétille, bavasse, ça diffuse du micro-trottoir sur le sexe. Après quoi, une loupiote passe à l’orange. La trogne enfarinée, les couples doivent livrer leurs impressions post-coïtales à une présentatrice glamour et à trois « experts » : une sexologue, un psychothérapeute et une spécialiste du langage corporel. À vrai dire, ils n’ont pas grand-chose à raconter, sinon que l’expérience est « intéressante ». Font-ils au moins l’amour ? Ils peuvent très bien piquer un roupillon.

Les couples sont trois à passer dans la boîte, représentant le bon panel : Blancs, Noirs, jeunes, gays… Pour éviter les critiques, Channel Four, qui est rarement avare de programmes chocs (l’an passé, ce sont quelques personnes qui se droguaient devant la caméra), a déployé le parapluie (ou sorti son condom) : il s’agit de faire de la pédagogie autour de l’acte sexuel. Ici, personne n’est humilié, éliminé. On fait dans le sociologique. C’est même « thérapeutique de partager sa relation avec tout le monde », dit le psychothérapeute. Tout est bon pour racoler. Après « Big Brother » et sa flopée de caméras, après les petits secrets opposés aux uns et aux autres, après les épreuves physiques exotiques et leur lot de ridicules exercices finissant par tuer (la dernière saison de « Koh-Lanta » aura tout de même causé la mort de deux personnes), voilà maintenant le sexe à la télévision. Pas celui que le téléspectateur peut chiper à la volée, façon « Loft Story » et Loana, mais du sexe érigé, assumé… sans se montrer. Soit une autre forme de voyeurisme. Entre vacuité, béance et ricanement, ce programme pathétique a tout de même rassemblé près d’un million de téléspectateurs outre-Manche. Et c’est bien cela qui intéresse les chaînes françaises, qui toujours importent ce type de programmes, de TF1 à M6 en passant par NT1 ou NRJ12. Combien, en parts de recettes publicitaires, peut rapporter une sex box ? Sans se poser la question de savoir si la box est nettoyée après chaque ébat. Ou pas.

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