Casseroles et ballon rond : le mondial vu par Guillaume Iskandar

L’univers de la gastronomie se partage bien souvent entre deux passions. D’un côté les fondus de l’ovalie, de l’autre les amateurs de foot. Ce Mondial est l’occasion d’un tour de table. Après Alain Passard, Jean-Marc Notelet et Michel Portos, place à Guillaume Iskandar, jeune chef aux cuisines du restaurant Garance, à Paris.

Jean-Claude Renard  • 4 juillet 2014
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Illustration - Casseroles et ballon rond : le mondial vu par Guillaume Iskandar

Quel est votre rapport au football ?
Guillaume Iskandar : J’ai aujourd’hui un rapport de spectateur, après avoir joué au foot à huit ans, jusqu’à dix-sept ans, à Luynes, en club. Mais au départ, c’était un truc de quartier, on jouait dans la rue.

Vous rappelez-vous la première fois où vous êtes allé dans un stade ?
C’était au Vélodrome, pour un match contre Montpellier, à l’époque de Cantona, de Valderrama, c’était la grande équipe de Montpellier, dans la saison 1989-1990…

Quelles sont vos plus grandes déceptions ?
Curieusement, ce n’est pas 2006, face à l’Italie, parce qu’une équipe déjà championne du monde perd toujours une finale. Ça fait partie des légendes. C’est arrivé au Brésil, à l’Argentine… Ma plus grosse déception, c’est OM-Valenciennes, tout ce qui a suivi après. C’était tout, sauf du football, c’était l’ouverture du JT tous les jours sur TF1 !

Que pensez-vous de l’arbitrage vidéo ?
Je n’y suis pas favorable. Cela crée des arrêts de jeu. C’est oui, c’est non, comme au rugby. Il n’y a plus rien de spontané, cela hache le jeu. L’erreur et l’arbitre font partie du jeu. Sinon, en dehors de la caméra sur la ligne de but, pour laquelle je suis pour, ça déshumanise le jeu. Le football, c’est un sport de rythme, d’enchaînements, de cassements de rythme, d’accélérations. Dix minutes d’arrêt, c’est insupportable. Mieux vaut ajouter des arbitres sur le terrain, mieux vaut infliger des sanctions après match pour toutes les tricheries.

Comment regardez-vous les matchs ? Seul, en groupe, en famille ?
Le plus souvent, seul, ça ne me dérange pas. Surtout pour les matchs à enjeu, par superstition sans doute. Dans la finale contre les Italiens, en 2006, je n’ai pas voulu regarder la séance des penalties. Je ne voulais pas voir l’échec. Il y a autant de superstitions que de trouille !

Illustration - Casseroles et ballon rond : le mondial vu par Guillaume Iskandar

Comment conciliez-vous les horaires des matchs et le service au restaurant ?
Je ne peux pas les regarder ! J’attrape des images ou les résultats par le téléphone, toutes les 5 minutes, discrètement. Le seul match qu’on peut regarder, c’est la finale de la Ligue des Champions, parce que c’est le samedi soir et qu’on est fermé.

Quel regard portez-vous sur ce Mondial et les mouvements sociaux au Brésil ?
Ils ont raison. Claquer dix milliards d’euros pour une coupe du monde, ce n’était pas la priorité ! Sur le fond, organiser un mondial au Brésil, c’est bien, mais ce n’est pas le bon moment, il y a encore trop de gens dans la misère. Est-ce que ce sera un tremplin pour eux, on verra… On verra aussi selon le parcours du Brésil. Mais il existe tellement d’inégalités entre les riches et les pauvres. Ils ont raison de se révolter, même si beaucoup sont des passionnés de foot. Ils sont autant dans le déni, le refus de cette Coupe du monde qu’ils ont envie que le Brésil la gagne. D’autant que pour beaucoup, le foot est un moyen de s’en sortir.

Comment jugez-vous l’attribution de la Coupe du monde au Qatar en 2022 ?
C’est carrément honteux, et ridicule. D’abord parce que le Qatar n’est pas une terre de football. Ils ont des stades sublimes, avec seulement 3 000 personnes dans les tribunes, et encore ! Il y avait bien d’autres pays pour l’organiser, mais là, dans un pays aussi déshumanisé… On sent l’escroquerie derrière tout ça.

Un favori, un pronostic pour cette dernière édition ?
Mon cœur va vers l’Argentine, mais ils ne semblent pas au mieux.

Restaurant Garance , 34 rue Saint-Dominique, Paris VIIe.

Temps de lecture : 4 minutes
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