La Mousson d’été : La découverte, oui, le jetable, non !

Créée par le metteur en scène et comédien Michel Didym, la Mousson d’été a fêté ses 20 ans du 22 au 28 août. Retour sur un festival curieux et fidèle.

Anaïs Heluin  • 28 août 2014 abonné·es

Michel Didym a toujours eu une dent contre la «   kleenexerie générale ». Autrement dit, contre l’obsession de la nouveauté, qui, lorsqu’elle touche au théâtre, provoque chez lui de vives réactions. Vives, par exemple, comme la création de la Mousson d’été, en 1995. Et comme son engagement dans l’organisation de ce festival estival dans l’abbaye des Prémontrés, à Pont-à-Mousson, en Meurthe-et-Moselle. Cette année, le metteur en scène et comédien a tenu à dresser le bilan de vingt éditions faites de lectures, de rencontres, de débats, de spectacles et d’ateliers. C’est chose faite avec la publication de la Mousson d’été. 20 ans d’écritures contemporaines. 1995-2014, signé par la journaliste Maïa Bouteillet.

Des chroniques journalières de Serge Valletti et de la complicité avec l’auteur espagnol Armando Llamas (1950-2003) jusqu’au partenariat avec le projet européen Fabulamundi, cet ouvrage présente les événements et personnalités qui ont contribué à faire de la Mousson un lieu majeur du théâtre contemporain. Une des clés de ce succès : un comité de lecture «   qui œuvre toute l’année pour dénicher des textes, les lire ou même les faire traduire », lit-on en introduction. Mise en place dès 1996, cette instance de sélection des textes, pilotée par la metteure en scène Véronique Bellegarde, reçoit chaque année plusieurs centaines de textes inédits à la scène. Car, si Michel Didym critique le culte de la nouveauté tel qu’il est pratiqué par « une partie du personnel culturel et de la presse », il est loin de tourner le dos aux écritures d’aujourd’hui. « Avec l’équipe de la Mousson d’été, nous tenons à faire entendre des textes qui viennent de s’écrire à travers lectures et mises en espace. Mais, surtout, nous voulons leur offrir une pérennité », affirme le directeur du festival. Et cette pérennité passe d’abord par l’édition : «   Nous travaillons entre autres avec Les Solitaires intempestifs, qui ont créé une collection “Mousson d’été” riche à ce jour de 65 titres », précise Michel Didym. Le suivi d’auteurs découverts à la Mousson, comme Rémi de Vos, le Grec Yannis Mavritsakis ou encore les inventeurs du Baleinié –   « dictionnaire des tracas » qui compte à ce jour quatre tomes et a donné lieu à trois spectacles –, va aussi dans ce sens.

Malgré des subventions qui stagnent depuis 2005, la Mousson d’été garde son rythme de croisière. Consacrée à la peur, la dernière édition a donné à entendre une trentaine de textes. En commençant par la Tigresse, de la Roumaine Gianina Carbunariu, enregistré en public par France Culture, qui, depuis 1997, est partenaire de l’événement. Très représentatif de l’ouverture de la Mousson aux écritures du monde, le spectacle Examen, créé par Michel Didym avec des élèves du Conservatoire de Nancy, a fait l’objet de deux représentations. «   Grâce au Goethe Institut de Nancy, j’ai pu commander à cinq auteurs français et à cinq Allemands des textes autour du thème de l’examen », explique le directeur du festival, qui, dans la Confession (1999) et Divans (2003), avait déjà expérimenté cette manière de générer des textes. Cette création, qui sera déclinée dans plusieurs centres dramatiques, participera au rayonnement de la Mousson pendant l’année. De même qu’un partenariat avec la Comédie-Française, en novembre, puis la Mousson d’hiver, équivalent de l’événement estival en direction du jeune public. L’université d’été, dirigée par Jean-Pierre Ryngaert pendant toute la durée du festival, fait elle aussi vivre la Mousson bien au-delà de l’abbaye des Prémontrés. En accueillant comédiens, professeurs, amateurs et metteurs en scène venus de toute l’Europe pour travailler sur les textes programmés, ce stage initie une réflexion sur la nature et la santé du théâtre contemporain, grande préoccupation de Michel Didym et de la centaine de collaborateurs qui l’épaulent chaque été.

Théâtre
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