Unanimité contre les méthodes scandaleuses de Valeurs actuelles

Jean-Claude Renard  • 17 octobre 2014 abonné·es
Unanimité contre les méthodes scandaleuses de Valeurs actuelles

**Cette semaine, l’hebdomadaire Valeurs actuelles consacre, au milieu d’un dossier sur Nicolas Sarkozy qui a valu à son directeur les félicitations téléphoniques de ce dernier, un article (non signé) à deux journalistes du *Monde , Gérard Davet et Fabrice Lhomme. Non sans hasard : ce sont deux journalistes en charge de l’investigation au quotidien du soir et, rappelle le journal, « auteurs de nombreuses révélations sur des affaires sensibles, notamment celles dans lesquelles le nom de Nicolas Sarkozy est cité » . Dans son papier, sans remettre en cause les révélations sur le rôle de Nicolas Sarkozy dans l’affaire Bygmalion, ni les informations sur le financement illégal de sa dernière campagne présidentielle, ni encore celles publiées sur l’ouverture d’une information judiciaire sur un soupçon de corruption visant l’entourage de l’ancien président, Valeurs actuelles relate des rendez-vous professionnels des deux journalistes, livrant ainsi une partie de leurs sources, au mépris de toutes les règles déontologiques.

Sitôt la parution de Valeurs Actuelles , le Monde , par la voix de son directeur, Gilles Van Kote, a déclaré dans ses colonnes : « Les faits et gestes de nos collaborateurs étaient surveillés et ils ont été probablement suivis. Ces méthodes visent clairement à empêcher nos journalistes d’effectuer leur travail d’investigation. Elles constituent une atteinte au secret de nos sources totalement inacceptable. »

Et d’annoncer, comme dans l’affaire des « fadettes », que la justice sera saisie, avec demande faite au parquet de Paris d’ouvrir une enquête « pour espionnage et de déposer une plainte pour diffamation et injure » . C’est bien le moins, car « l’enjeu dépasse notre journal et nos journalistes , poursuit Gilles Van Kote. La protection des sources ne constitue pas un privilège, mais est “une des pierres angulaires de la liberté de la presse”, a jugé la Cour européenne des droits de l’homme. Sans sources d’information indépendantes, sans moyens d’investigation, le journalisme ne peut plus s’exercer. Le Monde ne se laissera pas intimider et poursuivra sans relâche son travail d’enquête dans tous les domaines » .

Dans la foulée, quatorze rédactions se sont jointes au quotidien du soir pour dénoncer les méthodes de Valeurs Actuelles et pointer « l’atteinte grave au secret des sources »  : « Nous, journalistes, dénonçons collectivement et fermement les méthodes employées par le journal Valeurs actuelles, qui a publié le 15 octobre un article intitulé “Retour de Sarkozy : les rendez-vous secrets des deux journalistes du Monde”. Cette atteinte grave au secret des sources est indigne de notre métier » , déclarent dans un communiqué commun les sociétés des rédacteurs et des journalistes du Monde , du Figaro , du Parisien , du Nouvel Observateur , du Point , des Echos , de Radio France, de Mediapart, de Rue89, de L’Express , de Libération , d’Europe1, de RFI, et de TF1. « Nous soutenons nos confrères Gérard Davet et Fabrice Lhomme, chargés du suivi des affaires judiciaires au Monde, dont Valeurs actuelles a détaillé les rendez-vous. Nous tenons à rappeler qu’il n’y a pas de sources sans protection des sources. Qu’il n’y a pas d’information libre sans sources. Que c’est la démocratie qui est menacée quand il n’y a plus d’information libre » , poursuivent les rédactions signataires.

Politis est pleinement solidaire des journalistes du Monde et de cette démarche. Mais fallait-il s’attendre à autre chose de la part de Valeurs actuelles ? Sûrement pas.

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