EELV : Les Verts au bord du divorce ?
La question d’un retour d’EELV au gouvernement se poserait en cas de remaniement après les départementales. Certains écologistes se disent prêts à quitter le parti si celui-ci y met trop de conditions.
dans l’hebdo N° 1345 Acheter ce numéro
Grand marasme stratégique chez les écologistes. À quelques jours des élections départementales, la polémique va bon train entre certains de ses cadres autour de l’hypothèse d’un retour de ministres EELV au gouvernement. C’est le souhait des « pragmatiques », comme les désigne le député Denis Baupin, auquel s’adjoignent notamment les coprésidents du groupe écologiste Barbara Pompili et François de Rugy, ainsi que le sénateur Jean-Vincent Placé. Alors que l’ex-ministre du Logement Cécile Duflot y est fermement opposée au vu des conditions actuelles, c’est-à-dire les mêmes, selon elle, qui ont justifié son départ du gouvernement il y a un an : une politique d’austérité renforcée ainsi que l’intérêt secondaire du couple exécutif pour l’écologie, incompatibles avec la reconduction de l’alliance gouvernementale assumée pendant deux ans par EELV. La température, entretenue par des déclarations médiatiques croisées, est montée de quelques degrés quand Cécile Duflot a évoqué la participation des écologistes à « l’émergence d’une nouvelle force politique » pour « sortir du cadre actuel » [^2]. L’ancienne secrétaire nationale professe depuis des mois son ambition de rassembler au-delà de son parti, et son désir d’être candidate pour la présidentielle de 2017 ne fait plus mystère. « Elle signe en quelque sorte l’acte de décès d’Europe écologie-Les Verts », déplore François de Rugy sur Radio classique. Le parti écologiste serait-il au bord de la scission, comme certains commentateurs le suggèrent ?
À en croire Céline Bracq, « le divorce est donc bel et bien consommé entre Cécile Duflot et sa base électorale, ce qui lui rend la tâche particulièrement difficile si elle souhaite se présenter à nouveau à l’élection présidentielle ». La directrice générale d’Odoxa commentait samedi dernier un sondage réalisé par son institut pour le Parisien, d’où il ressortait que « 92% des sympathisants écologistes sont pour un retour d’EELV au gouvernement ». Une non-information, le parti ayant toujours professé sa vocation à gérer les affaires. Et comme on n’a pas demandé aux 1 008 sondés à quelle condition ils appuieraient un tel retour… Par ailleurs, ils sont 60 % à estimer qu’EELV risque d’imploser. Une même proportion, selon Odoxa, redoutaient il y a quelques semaines un sort identique pour l’UMP et le PS. Et par ailleurs, Cécile Duflot ne s’est jamais présentée à la présidentielle…
Le député, sous couvert du « club de réflexion » Repères écologistes, âgé de 6 mois et regroupant les « pragmatiques », invite le 4 avril prochain à un débat intitulé « Quelle responsabilité aujourd’hui pour les écologistes? ». À la table, des personnalités de la mouvance écolo proche du centre et du centre-droit [^4]. Denis Baupin se défend de se prêter à une manœuvre « pro-Hollande », le Président suscitant l’émergence d’un parti concurrent d’EELV, comme l’avait fait François Mitterrand en 1990 avec Génération écologie pour affaiblir des Verts trop exigeants à son goût. « Un sorte de PRG vert, un pseudopode du PS qui lui devrait tout ?, brocarde un Pascal Canfin dubitatif. La fuite ne concernerait qu’une poignée de militants, opération vaine pour Hollande qui ne rallierait pas EELV en 2017, renforçant même la détermination de Duflot de se présenter. »
[^2]: Libération, 8 mars.
[^3]: Voir Politis n° 1341, 19 février.
[^4]: Dont Jean-Luc Bennahmias (Front démocrate), Corinne Lepage (Cap 21), Antoine Waechter (Mouvement écologiste indépendant), Yves Piétrasanta et France Gamerre (Génération écologie).