« Qui a tué Ali Ziri ? », de Luc Decaster : Déni de justice

Luc Decaster a suivi un collectif réclamant la vérité dans l’affaire Ali Ziri, mort dans un fourgon de la police.

Jean-Claude Renard  • 7 octobre 2015 abonné·es
« Qui a tué Ali Ziri ? », de Luc Decaster : Déni de justice
© **Qui a tué Ali Ziri ?** (1 h 37). Photo : PAULETTO/Citizenside/AFP

C’est d’abord une addition de questions. Une addition lourde : Ali Ziri a 69 ans quand il décède en juin 2009, après son interpellation par la police à la suite d’un contrôle routier à Argenteuil. Le procureur de Pontoise conclut à « l’arrêt cardiaque d’un homme au cœur fragile ». Aussitôt se crée un collectif soutenant la famille Ziri, qui vit en Algérie, demandant une contre-expertise. Deux mois plus tard l’institut médico-légal relève pas moins de vingt-sept hématomes sur le corps du défunt. Pourquoi refuse-t-on à la défense d’accéder au dossier ? Pourquoi la famille ne peut-elle pas voir la vidéo des faits ? Que s’est-il passé avec les trois policiers qui ont arrêté Ali Ziri puis avec les quatre autres venus en renfort pour le descendre du fourgon ? On ne sait rien de ce qui s’est passé dans ce véhicule qui a transporté l’homme du commissariat à l’hôpital. Trois semaines après les faits, les traces de blessures étaient encore visibles sur son corps… Le collectif n’aura de cesse de demander justice, d’alerter les médias. En vain. Il n’y aura guère que le cinéaste Luc Decaster pour s’intéresser à ce déni de justice, suivant le collectif cinq années durant, caméra à l’épaule. Une caméra partie prenante, scandalisée.

Decaster n’apporte aucun commentaire qui surlignerait le drame, pas même un banc-titre. Comme il l’avait fait dans On est là ! (2011), au cœur de l’occupation d’une société de nettoyage par ses salariés, de façon sobre et épurée, il filme discrètement, mais sans rien enlever à l’émotion, demeurant au plus près des corps, calé sur les démarches des uns et des autres, les réunions en petit comité, les manifestations, embrassant les revendications, les interrogations laissées sans réponse de proches qui ne demandent pas autre chose que la vérité, pour sortir de « l’intolérable dans un État de droit ». À bout de souffle.

Culture
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