Au deuxième tour, fusionner ou pas ?

En raison d’un mode de scrutin qui autorise les fusions de listes, la gauche et le PS seront face à un vrai casse-tête au soir du premier tour.

Michel Soudais  • 2 décembre 2015 abonné·es
Au deuxième tour, fusionner ou pas ?
© Photo : GUILLOT/AFP

Officiellement, la question ne se pose pas avant de connaître le résultat du premier tour. La fusion des listes Front de gauche et Europe écologie-Les Verts avec celles du Parti socialiste est pourtant âprement discutée dans les rangs de ces formations. Depuis 2004, l’élection régionale se joue à deux tours, et les listes qui obtiennent au moins 10 % des suffrages exprimés peuvent se maintenir et fusionner avec les listes ayant obtenu au moins 5 %. Si l’UMP a toujours refusé cette possibilité au nom d’une conception bonapartiste de la politique, le PS a presque toujours accepté de fusionner avec les listes de gauche et écologistes qui l’avaient concurrencé au premier tour en défendant des projets concurrents, dont il acceptait de reprendre quelques points pour constituer des majorités de gestion.

Mais la situation a changé. Le PS n’est plus dans l’opposition comme en 2004 et 2010, et la politique du gouvernement est très largement rejetée dans les rangs de la gauche. Du coup, les demandeurs ont changé de camp. Mi-octobre, le PS organisait un pseudo-référendum pour forcer ses ex-partenaires à rejoindre ses listes. Ce qui ne va plus de soi. Leurs désaccords politiques sont tels que tout rapprochement ne pourrait être programmatique qu’à la marge. « En moins de 24 heures, on ne va pas faire semblant d’être d’accord sur tout, prévient l’écologiste Gérard Onesta dans le Midi libre (19 novembre). Si jonction il doit y avoir […], ce sera sur la base plutôt d’un accord technique pour empêcher la droite et l’extrême droite de conquérir la région. » Mais pour le troisième tour (l’élection de la présidence de région) la tête de liste du Nouveau Monde en commun (EELV-FG-NGS) veut pouvoir choisir « une femme ou un homme, issu des rangs de la gauche, qui la représentera beaucoup mieux que ne pourrait le faire le PS ou Carole Delga », la tête de liste socialiste.

En Île-de-France, Pierre Laurent, qui conduit la liste du Front de gauche, ne fait pas mystère de souhaiter un accord : « J’ai toujours dit que, personnellement, je pense qu’il faudrait travailler à une fusion des listes de gauche pour empêcher la droite et l’extrême droite de prendre le pouvoir dans la région. » Mais cette perspective est rejetée par nombre de militants du Parti de gauche (PG) et d’Ensemble !, mais aussi de leurs camarades communistes, qui souhaitent couper les ponts avec les socialistes. Qui l’emportera ? « Nous prendrons nos décisions le 6 décembre », temporise Éric Coquerel, coordinateur du PG et tête de liste Front de gauche à Paris. « Il y aura une décision collective pour une fusion ou un éventuel maintien car nous espérons faire un score à deux chiffres », précise-t-il, en rappelant que l’accord passé entre les différentes composantes du Front de gauche prévoit que « chaque parti reste souverain ». En clair, il n’est donc pas exclu que l’un d’entre eux, au moins, décide de se retirer. Fait nouveau, la question du second tour va aussi se poser au PS. À plusieurs reprises, Manuel Valls a déclaré qu’il devra « tout faire » pour empêcher une victoire du FN dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie ou en Paca. Un retrait de ses listes y est envisagé. Et, pour EELV, Emmanuel Cosse y est prête.

Politique
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