Mélenchon : « Allez, au boulot ! »

Dimanche, Jean-Luc Mélenchon lançait, place Stalingrad à Paris, sa campagne pour la présidentielle, en présence d’une foule compacte.

Pauline Graulle  • 5 juin 2016
Partager :
Mélenchon : « Allez, au boulot ! »
© Photo: Michel Soudais

« Ça y est, je retrouve les même sensations que la dernière fois », glisse une spectatrice à sa voisine. Elle n’était sans doute pas seule à avoir ce sentiment de « déjà-vu », dimanche, Place-Stalingrad, dans le 19e arrondissement de Paris. Même lieu, même foule compacte, même Marseillaise et Internationale entonnées en fin de meeting, même verve qu’il y a cinq ans, presque jour pour jour, lors du premier meeting de Jean-Luc Mélenchon pour la campagne de 2012. Seuls manquaient les drapeaux Front de gauche flottant dans le public, la cravate rouge et… quelques rayons de soleil.

La présidentielle, Jean-Luc Mélenchon y retourne. Pour gagner, cette fois. Porté par de bons sondages, l’ex leader du Parti de gauche, débarrassé des oripeaux des partis (du PCF notamment, qui organisait au même moment un pique-nique jour pour fêter la fin de son congrès), a opté pour une échappée gaullienne. Une rencontre directe entre lui et le peuple.

LIRE NOTRE DOSSIER >> Gauche: Des stratégies divergentes

Et le peuple était là, dimanche. « Nous sommes 10 000 ! », hurlait au micro Charlotte Girard, co-animatrice de l’événement, tandis que Mélenchon s’avançait, sous les « hourras », pour prendre possession de l’estrade.

Auparavant, des dizaines d’« insoumis » y avaient défilé. Cheminots, sans-papiers, métallos, personnels hospitaliers, intermittents, syndicalistes, agriculteurs bio, profs, fonctionnaires territoriaux, chômeurs, taxis « ubérisés »… L’idée étant de rassembler sous une même colère tout ce que la France compte de déçus du hollandisme – et ils sont nombreux, comme chacun sait. Et de montrer que tous les ras-le-bol mènent à Mélenchon : des « Nuit Debout » aux « antifas », en passant par les anti-loi-El-Khomri et même… les inondés. « Jean-Luc, je te souhaite bien de belles victoires », a adoubé, sur écran géant, l’ex-présidente du parlement grec, démissionnaire de Syriza, Zoé Konstantopoulo.

« Agissez ! »

Dans le public, on a vite retrouvé les vieux réflexes – scander « Résistance, résistance ! » au lieu de « Jean-Luc, président ! ». Et à la tribune, le candidat a renoué avec ses – désormais célèbres – « accents gaulliens » pour un discours de politique générale plutôt inspiré. De mobilisation, aussi. Au centre de ses critiques, pas tant la loi El-Khomri que « le monde » qui va avec. Ce « monde de la souffrance au travail », du chômage, du désastre climatique. Appelant à « réorganiser la civilisation humaine », en passant notamment « au 100 % énergies renouvelables », il a évoqué le « destin de la France […] splendide de savoirs et de culture ». De Gaulle n’était pas loin, en effet.

Jamais avare de bonnes formules, il a vilipendé les « 40 obstinés du gouvernement », les « postures parlementaires » (des frondeurs socialistes), les « candidats passe-muraille » et les « candidats champignons »...« Il faut du caractère, de la volonté, pour défier [les] lobbys immenses, a-t-il souligné. Mieux vaut pour vous d’avoir des porte-parole rusés et malins que des poulets de l’année ! » Éclat de rire dans la foule, conquise.

Bien conscient qu’en cette époque « 2.0 », le parti politique traditionnel a vécu, Jean-Luc Mélenchon a mené une véritable séance d’« empowerment » à l’attention de ces « insoumis » qui s’affirment ou s’ignorent. Oui, on peut « reprendre le contrôle sur notre destin », a-t-il assuré. « Vous êtes le nombre, la force, vous êtes irrépressibles. » Et de lancer le principe du « un pour un », chacun devant convaincre un autre « qu’il est possible de mieux faire » qu’en 2012. « Je suis votre porte-parole, quant au reste, agissez ! », a-t-il dit, réussissant en cet instant précis à faire se rencontrer le « moi-je » de la Ve République et le « nous autres » de la VIe… Puis de conclure, autant pour lui-même qu’à l’attention de la foule se dispersant : « Allez, au boulot ! »

© Politis
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Budget : les chiffres qui montrent que la gauche est en train de perdre
Analyse 22 octobre 2025

Budget : les chiffres qui montrent que la gauche est en train de perdre

La majorité des plus de 1 700 amendements déposés par les députés ont été examinés par la commission des finances. Et le premier bilan chiffré n’est pas bon pour les groupes parlementaires du Nouveau Front Populaire, dont la majorité des amendements ont été rejetés.
Par Pierre Jequier-Zalc
En commission, le RN et la Macronie s’allient pour défendre un budget d’ultra-riches
Analyse 22 octobre 2025 abonné·es

En commission, le RN et la Macronie s’allient pour défendre un budget d’ultra-riches

Les débats sur le volet recettes du projet de loi de finance pour 2026 ont débuté ce lundi en commission des finances, donnant à voir une alliance tacite entre le bloc central et le RN pour protéger les privilèges des plus aisés et des grandes entreprises.
Par Pierre Jequier-Zalc
Budget : « Le PS est en train de commettre une faute politique très grave »
Entretien 22 octobre 2025 abonné·es

Budget : « Le PS est en train de commettre une faute politique très grave »

Depuis lundi matin en commission, Claire Lejeune, députée insoumise de la septième circonscription de l’Essonne débat du volet recettes du projet de loi de finances 2026. Sans réussir à obtenir d’avancées majeures, alors que les débats en séance commencent vendredi.
Par Pierre Jequier-Zalc
VIDÉO – Soutien à Nicolas Sarkozy : « Honte à la justice ! »
Reportage vidéo 22 octobre 2025

VIDÉO – Soutien à Nicolas Sarkozy : « Honte à la justice ! »

Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées le 21 octobre au matin dans le XVIe arrondissement de Paris pour protester contre l’incarcération de Nicolas Sarkozy. Reportage.
Par Pauline Migevant