Enzo Traverso : « Trump est un fasciste sans fascisme »
L’historien italien Enzo Traverso* analyse la victoire du candidat républicain et s’interroge sur la dimension « populiste » du personnage.
dans l’hebdo N° 1428 Acheter ce numéro

Spécialiste de l’époque 1914-1945, de la « guerre civile européenne », comme il l’a lui-même qualifiée [^1], Enzo -Traverso observe le phénomène Donald Trump à l’aune de l’histoire des populismes sur les deux rives de l’Atlantique, notamment les fascismes européens.
Souvent désigné comme populiste, Donald Trump peut-il être qualifié de fasciste (ou de post-fasciste) au regard de son programme et de sa personnalité ?
Enzo Traverso : Il faut d’abord dire que ce débat a eu lieu aux États-Unis, notamment dans les grands journaux, et que plusieurs observateurs ont donné une réponse positive, y compris des personnalités néoconservatrices comme Robert Kagan. Pour ma part, je suis plus réservé sur cette définition, qui me paraît douteuse.
En tant qu’Italien, je rapprocherais plus volontiers Donald Trump de Berlusconi que de Mussolini. Toutefois, je reconnais que plusieurs traits de sa personnalité peuvent être qualifiés de fascistes : nationalisme radical, xénophobie, racisme, sexisme… Tout cela appartient au code génétique du fascisme. L’usage du racisme comme code culturel (tout comme, en Europe, celui qui est fait de l’islamophobie et de la xénophobie contre les migrants) rappelle beaucoup la démagogie antisémite