Les COP se suivent et se ressemblent

Depuis 1970, la moitié des réserves marines a été perdue.

Jean-Marie Harribey  • 14 décembre 2016 abonné·es
Les COP se suivent et se ressemblent
© Franco Banfi / Biosphoto / AFP

À peine la COP 22 sur le réchauffement climatique s’est-elle achevée à Marrakech, sans avancée notable, que s’est ouverte à Cancún (Mexique), du 4 au 17 décembre, la 13e Conférence des 196 parties de la Convention sur la diversité biologique (COP 13 sur la CDB). En effet, au Sommet de la Terre de 1992, à Rio de Janeiro, fut adoptée une Convention sur la diversité biologique fixant trois objectifs : la conservation de la biodiversité, son utilisation durable et son partage juste. Sa mise en application suit les procédures habituelles du Programme des Nations unies pour l’environnement. Ainsi, lors de la COP 10-CDB qui eut lieu à Nagoya (Japon) en 2010, furent précisés les « objectifs d’Aichi » dans un Plan stratégique pour la diversité biologique 2011-2020.

Le rapport 2015 du WWF intitulé Planète vivante océans pointe le déclin de ces derniers, qui met en péril la sécurité alimentaire de l’humanité. Globalement, les stocks de poissons et de mammifères marins diminuent. De 1970 à 2012, sur 5 829 populations appartenant à 1 234 espèces, la moitié des réserves a été perdue, et même les trois quarts pour certaines espèces (thon, maquereau et bonite). Disparaissent aussi les récifs coralliens, les mangroves et les herbiers marins qui abritent les espèces animales ou qui épurent les eaux. En outre, le dioxyde de carbone, principal responsable du réchauffement climatique, accentue l’acidité des océans, aggravant les conséquences de la surexploitation des ressources halieutiques. Globalement, la biodiversité terrestre et maritime se dégrade : la moitié des vertébrés ont disparu en quarante ans, bientôt les deux tiers.

L’enjeu officiel de la conférence de Cancún est appelé « intégration ». Il ne s’agit plus d’agir en faveur de la biodiversité seulement dans le cadre de politiques isolées dites environnementales, mais d’intégrer l’action dans l’ensemble des politiques concernant tous les secteurs de l’économie : agriculture, forêts, pêche, industrie, tourisme, etc., et aussi dans les politiques transversales comme la lutte contre le réchauffement climatique ou celle contre la pauvreté.

Dans un contexte où les pays riches se révèlent les moins prompts à agir, la COP 13 est-elle à la hauteur de la situation ? L’idée de faire pénétrer le souci de la biodiversité dans l’ensemble des politiques au lieu de le cantonner aux aires protégées est bonne. De même, la mobilisation de tous les acteurs de l’économie autour de cet objectif est nécessaire. Mais, sans régulations inter-étatiques fortes, le risque est de diluer les actions dans des partenariats privé-public, dont le but est de rentabiliser de nouvelles filières de production, ou bien d’abandonner la protection aux mains de la finance, très imaginative en matière de titres financiers censés offrir une compensation aux destructions, compensation explicitement prévue dans la loi française du 8 août 2016 sur la biodiversité. Et, à l’inverse des préconisations d’Aichi, se profile l’idée que les « aires marines protégées » seront un « bon investissement pour la santé des océans [^1] », au terme d’un calcul coûts/bénéfices où le taux de rentabilité économique de ces aires atteindrait 24 %. Chassez le… naturel du capitalisme, il revient au galop.

[^1] Voir le rapport du même nom sur wwf.fr

Jean-Marie Harribey Membre du conseil scientifique d’Attac

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