Mort de Liu Shaoyo : nouvelle bavure policière ?

Un père de famille chinois de 56 ans a été tué par la BAC dimanche 26 mars à Paris. Les versions de la police et de la famille sont opposées. Pékin a exprimé son inquiétude auprès du Quai d’Orsay.

Hugo Boursier  • 28 mars 2017
Partager :
Mort de Liu Shaoyo : nouvelle bavure policière ?
© Photo : LOïC VENANCE / AFP

Une nouvelle bavure policière ? C’est en tout cas ce que dénonce Me Calvin Job, un des deux avocats – avec Me François Ormillien – de la famille de Liu Shaoyo, un Chinois de 56 ans tué par un fonctionnaire de la brigade anticriminalité (BAC), dimanche soir, à son domicile du XIXe arrondissement de Paris.

Une manifestation en son hommage était organisée lundi soir devant le commissariat de ce quartier. Environ 150 personnes étaient présentes et ont déposé des bougies en mémoire du défunt. Parmi elles, 35 ont été interpellées plus tard dans la soirée, suspectées d’avoir brisé la vitre d’une voiture de police et jeté des objets incendiaires. Depuis août 2016, la communauté asiatique montre son exaspération face au racisme et aux préjugés auxquels elle est confrontée.

À lire >> Les Chinois brisent l’omerta, pour notre numéro : Le racisme est-il devenu légal ?

Un racisme qui s’est exposé sans réserve sur Twitter, comme le recense ce tweet de Fdebranche :

© Politis

Un mort, deux versions

Vers 20 heures, dimanche, les policiers sont intervenus dans la résidence Villa Curial, rue d’Aubervilliers, suite à l’appel d’un voisin qui se plaignait de cris émanant de l’appartement de Liu Shaoyo. Forçant la porte, ils auraient été immédiatement attaqués par ce dernier, blessant un des policiers à l’aide d’une paire de ciseau. Son collègue aurait alors répliqué, abattant l’homme d’une balle au niveau du thorax.

À lire >> Des milliers de personnes ont marché pour la justice et la dignité

Une version contraire à celle de la famille du défunt. Leur avocat explique que les policiers ont « tiré sans sommation » sur Liu Shaoyo, alors qu’il était « en train de tailler, à l’aide de ciseaux, des poissons qu’il cuisinait ». Il affirme également que l’homme n’a « porté aucun coup » et « ne s’est pas précipité » sur les forces de l’ordre. Ses enfants de 15 à 21 ans se trouvaient sur place.

La famille a été entendue par l’IGPN, qui s’est saisie de l’enquête. Elle a également exprimé sa volonté de porter plainte. Le Conseil représentatif des associations asiatiques de France, présidée par Jacques Sun, souhaite se porter partie civile, pour « comprendre ce qui a pu se passer », rappelant que c’est « une famille fragile » et que « les enfants sont dévastés », comme l’indique Le Parisien.

Échanges diplomatiques

Nous avons rapidement lancé des protestations officielles auprès des autorités françaises et exigé qu’elles fassent toute la lumière sur l’incident, prennent des mesures efficaces afin de protéger la sécurité, les droits et les intérêts légitimes des citoyens chinois, et traitent la réaction des Chinois vivant en France à cet incident d’une manière raisonnable.

Les réactions de Pékin ne se sont pas fait attendre. La porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Hua Chunying explique :

Le porte-parole du Quai d’Orsay, Romain Nadal, s’est empressé de répondre en affirmant que la sécurité des ressortissants chinois était « une priorité des autorités françaises ». « Toutes les dispositions sont prises pour leur réserver les meilleures conditions d’accueil et de sécurité », a-t-il assuré.

Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

« Plan social déguisé » : 20 salariés d’un sous-traitant d’Amazon contestent leur licenciement
Luttes sociales 15 octobre 2025 abonné·es

« Plan social déguisé » : 20 salariés d’un sous-traitant d’Amazon contestent leur licenciement

Licenciés pour faute il y a un an, ils ont décidé d’attaquer cette décision auprès des prud’hommes de Marseille, ce mercredi. En cause : le refus d’être mutés à plus de 130 kilomètres de leur lieu travail suite à la perte d’un contrat avec Amazon.
Par Pierre Jequier-Zalc
À Paris, la Confédération paysanne en première ligne contre le Mercosur
Reportage 15 octobre 2025 abonné·es

À Paris, la Confédération paysanne en première ligne contre le Mercosur

Plusieurs centaines de personnes ont manifesté le 14 octobre contre le traité de libre-échange UE-Mercosur, à Paris, à l’appel du syndicat. Un texte qui exercerait une concurrence déloyale pour les agriculteurs français et menacerait la santé et le climat.
Par Vanina Delmas
Dans les CRA, une justice en visio rendue loin des regards
Reportage 15 octobre 2025 abonné·es

Dans les CRA, une justice en visio rendue loin des regards

Depuis le covid et la loi asile et immigration promulguée en janvier 2024, la justice en visioconférence se développe dans des annexes de tribunaux au sein des centres de rétention. Ces audiences cruciales pour la liberté des personnes menacées d’expulsion ont lieu sans public et au mépris des droits de la défense.
Par Pauline Migevant
En Essonne, des vies suspendues au rendez-vous de la préfecture
Reportage 15 octobre 2025

En Essonne, des vies suspendues au rendez-vous de la préfecture

En Essonne, depuis 2022, la préfecture ne donne plus de premier rendez-vous pour les demandes d’admission exceptionnelle au séjour. Pour les étrangers concernés, saisir le le tribunal ne semble d’aucun recours.
Par Pauline Migevant