La colère des « forçats du bitume »
Les plateformes de livraison à vélo spéculent sur la normalisation du modèle « Uber », qui profite de vides juridiques. Mais elles doivent désormais composer avec une fronde sociale inédite.
dans l’hebdo N° 1459 Acheter ce numéro

Avec leur casaque et leur hotte verte ou violette, selon qu’ils travaillent pour Deliveroo ou Foodora, ils sont les nouvelles mascottes de l’ubérisation. Les livreurs à vélo ont fait une entrée fracassante dans les villes françaises. Trois ans à peine après l’apparition des plateformes numériques de la « foodtech », qui proposent aux particuliers des livraisons de repas via des applications téléchargeables d’un simple clic sur smartphone, ils sont 9 000 à quadriller nos rues.
Pour les « gros rouleurs », le job peut être financièrement intéressant. « Certains gagnent jusqu’à 3 000 euros par mois, s’ils peuvent passer 10 heures par jour sur le vélo », raconte Émile, étudiant parisien, qui travaille une quinzaine d’heures par semaine chez Deliveroo pour financer ses études. Mais c’est partout la même histoire : les premiers mois, les plateformes payent leurs livreurs assez généreusement pour les fidéliser et offrir immédiatement une qualité de service honorable à leurs clients. Mais elles baissent leur rémunération après quelques mois et suppriment les primes (d’intempérie ou de week-end, notamment). Si bien que, finalement, les salaires dépassent rarement le Smic horaire.
Chez Deliveroo, le leader du marché, fondé en 2013, le livreur n’est même plus payé pendant le temps passé à attendre les commandes, bien qu’il soit tenu de camper sur une place de centre-ville pour enfourcher son vélo à la seconde où une course lui est notifiée. Le tarif, à Paris, c’est 5,75 euros la course. Son concurrent Foodora garantit encore 7 euros de l’heure, plus 2 euros par course, quand UberEats rétribue en fonction du nombre de