La France insoumise présente son contre-budget

Le groupe FI à l’Assemblée nationale a dévoilé ce jeudi une contre-proposition de budget, misant sur une relance de la dépense publique pour faire tomber le chômage à 6 %.

Erwan Manac'h  • 2 novembre 2017 abonné·es
La France insoumise présente son contre-budget
© Photo : Michel Soudais

Une avalanche de chiffres, pour montrer le sérieux du travail de « modélisation » et la précision des analyses, et un contre-pied radical avec le budget 2018 en cours d’examen à l’Assemblée… Les députés de la France insoumise ont présenté ce jeudi un document de 50 pages détaillant les mesures de leur « contre-budget » pour l’année 2018. Manière de tacler celui du gouvernement, _« qui donne beaucoup aux premiers de cordée et laisse des miettes à leurs sherpas », résume l’économiste de FI, Liêm Hoang-Ngoc [1]. Et de se montrer actif sur les dossiers techniques.

La France insoumise préconise un plan d’investissement de 100 milliards d’euros sur cinq ans « pour faire tourner l’économie ». Une enveloppe financée par l’emprunt, qui devra provoquer une relance de l’activité à même d’assainir les finances de l’État.

Miser sur un État redistributeur

Il propose également une hausse de 173 milliards d’euros des dépenses publiques sur cinq ans, pour que l’État redevienne redistributeur, qu’il joue le rôle d’« employeur en dernier recours » et lutte fortement contre la pauvreté, la crise climatique et pour la sécurité. Danièle Obono, député FI de Paris, défend ainsi une augmentation de 2,5 milliards d’euros des moyens dans la justice et la police.

Un retour en grâce de l’État-providence financé par 170 milliards de hausses d’impôts, reposant sur les plus aisés. À raison d’une progressivité beaucoup plus forte de l’impôt sur le revenu – en 14 tranches contre 5 aujourd’hui – qui allégera la note des classes moyennes et fera contribuer plus fortement les Français gagnant plus de 4 000 euros par mois. Avec une tranche supérieure de 90 % d’imposition pour ceux qui gagnent plus de 400 000 euros par mois. Une super TVA à 33 % sur les produits de luxe, le renforcement de l’impôt sur la fortune et des droits de succession devront faire le reste. Ainsi qu’une lutte drastique contre l’évasion fiscale et qu’une suppression du CICE et des niches fiscales.

Résultat, affirme le groupe FI, le pouvoir d’achat des ménages repartirait à la hausse, malgré une inflation consentie à 4,2 % d’ici à 2022. Le chômage baisserait à 6 % en 2022, contre 9,2 % aujourd’hui. Et la reprise de l’économie conduirait la France vers une dette à 87 % du PIB, contre 96,3 % aujourd’hui, affirme Éric Coquerel, membre de la commission des Finances.

Pour attester du sérieux de son budget, élaboré par les équipes parlementaires et les économistes proches du parti, avec le concours de hauts fonctionnaires engagés (et anonymes), les députés veulent montrer patte blanche. Les critères choisis pour mesurer l’endettement sont ceux de Bruxelles et l’article 40, qui contraint à gager toute dépense nouvelle sur une recette, est respecté, affirme le groupe parlementaire. Et le coefficient multiplicateur choisi – pour estimer la richesse créée par un euro supplémentaire d’argent de l’État – est le plus bas qui circule parmi les économistes affirme Éric Coquerel [2].

PCF et PS présentent des contre-budgets plus modérés

Le Parti socialiste s’est prêté début octobre au même exercice, en présentant un contre-budget pour « réduire les inégalités », qui se résumait pour l’essentiel à un retour sur les grandes mesures d’économies du gouvernement d’Édouard Philippe (suppression des contrats aidés, de l’ISF et baisse des fonds pour les bailleurs sociaux). Sans commune mesure donc avec le plan de relance préconisé par FI.

Le Parti communiste présentait également, le 24 octobre, un contre-budget qui tablait sur l’annulation des « cadeaux fiscaux » (ISF, flat tax, baisse de l’impôt sur les sociétés…), la lutte contre l’évasion fiscale et une taxe sur « le chiffre d’affaires des grands groupes » et « les géants du numérique ».

[1] Liêm Hoang-Ngoc est également chroniqueur pour Politis.

[2] Le coefficient multiplicateur de la dépense publique retenu est 1,4.

Politique Économie
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