Le massacre des loups continue

Alors que les études montrent que les tirs d’élimination encouragent le braconnage et que les loups français ne sont pas des hybrides, le gouvernement réfléchit à l’éradication de progressive de l’espèce.

Claude-Marie Vadrot  • 29 novembre 2017
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Le massacre des loups continue
© photo : Francois Gilson / Photononstop

En cette époque hivernale au cours de laquelle le ministère de l’Écologie et le gouvernement sont en train de réfléchir sur le « plan loup » qui s’appliquerait en France de 2018 à 2023, il est nécessaire de rappeler que toutes les études menées aux États-Unis, au Canada et en Europe du Nord montrent que les mises à mort « administratives » de loups ne règlent aucun des problèmes soulevés par les chasseurs et les éleveurs.

Pour le territoire français, le ministère de l’Écologie avait autorisé 40 infractions à la loi, (nationale et européenne) qui protège rigoureusement cet animal, pour une période comprise entre le 1er juillet 2017 et le 30 juin 2018. En cette fin de novembre, le « score » officiel est déjà de 25 loups. Chiffre qui ne tient évidemment pas compte des animaux discrètement empoisonnés et de ceux qui sont non moins discrètement abattus par des chasseurs et plus rarement par des éleveurs. Les estimations les moins pessimistes relevées auprès des naturalistes et des scientifiques, font actuellement état de 50 à 60 animaux déjà « éliminés ». Alors que le Canis lupus compte en France, tous âges et sexes confondus, entre 350 et 370 individus.

Braconnage

Ces chiffres ne sont pas surprenants puisque les enquêtes, notamment celles menées pendant les quinze dernières années dans le Minnesota et le Wisconsin aux États-Unis, tendent à prouver que l’autorisation d’abattre des animaux avait pour conséquence d’encourager et aussi de dissimuler le braconnage. Or celui-ci, d’après Adrian Treves, chercheur à l’université du Wisconsin, peut représenter jusqu’à un quart des prélèvements autorisés. Les dégâts entraînés sur la survie de cette espèce sauvage sont d’autant plus importants que si les tirs sélectifs peuvent réussir à respecter un certain équilibre, il n’en est jamais de même en ce qui concerne le braconnage, qu’il s’agisse des États-Unis, de la Suède et évidemment de la France. Comme ils l’ont fait ailleurs pour le lynx, les chasseurs-braconniers privilégient les femelles et des petits. L’expérience montre que tout manquement à la protection d’une espèce mène à sa disparition.

Chasseurs et éleveurs obsédés

Pour « calmer » les deux syndicats d’agriculteurs qui militent ouvertement pour l’éradication totale du loup avec l’appui des associations de chasseurs obsédés par la « concurrence », les responsables des Offices de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), des préfectures et des tribunaux ont reçu du nouveau ministre de l’Agriculture Stéphane Travert (seul vrai décisionnaire sur le loup) de fermer les yeux et de classer sans suite les infractions concernant le loup. 

Malgré tout, les responsables de l’ONCFS se sont refusés à dissimuler les résultats d’une étude sur l’origine des loups vivant sur le territoire français. Comme éleveurs, agriculteurs et chasseurs répandaient la rumeur que la majorité des animaux tués légalement ou non, était des hybrides (croisements avec des chiens), les scientifiques de la chasse ont vérifié puis conclu, après analyses, que d’après les traces relevées, directement ou indirectement, sur 130 individus, seuls deux pouvaient être considérés comme des hybrides. Tous les autres relevaient de la lignée italienne ayant fait son apparition en France en 1992.

Reste maintenant à savoir quelle décision prendra prochainement le ministre de l’Agriculture entre l’intensification importante des tirs d’effarouchement ou l’élimination en cinq ans de 180 à 200 loups, chiffres qui circulent au cabinet. Et malheureusement pour le loup, il y a des élections en 2019….

Temps de lecture : 3 minutes
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