Trump, police de la pensée, scientifiques méprisés, chercheurs licenciés

Après avoir fait virer des centaines de chercheurs, le président américain fait la chasse au vocabulaire « subversif » au nom de son idéologie et de la religion. Accablement des scientifiques et applaudissement de l’extrême-droite

Claude-Marie Vadrot  • 27 décembre 2017
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A l’imitation de Rick Scott, le gouverneur de Floride qui interdit depuis des années aux membres de son administration tous les mots ou expressions liées aux dérèglements climatiques, le président américain vient de commencer à imposer une police de la pensée. Tandis que le gouverneur républicain, au pouvoir depuis 2011, affirme régulièrement que face aux éléments déchainés ou la mer qui envahit régulièrement Miami, seule la prière est efficace, l’administration Trump a donné instruction aux agences et organismes fédéraux de ne plus avoir recours à certaines expressions. Sont donc, par exemple, désormais interdits, aussi bien aux scientifiques qu’aux chercheurs ou fonctionnaires, les mots «transgenre», « diversité », « basé sur la science», « fœtus » ou « fondé sur des faits scientifiques ». D’autres suivront rapidement.

Police de la pensée

Cette chasse au vocabulaire controversé par la droite américaine a une nouvelle fois atterré les scientifiques de nombreuses spécialités. Elle confirme que Donald Trump a entrepris de mettre progressivement en place une véritable police de la pensée dont le fondement repose sur trois piliers. D’abord que les scientifiques racontent n’importe quoi et sont inutiles, ensuite que la presse fait trop confiance aux chercheurs et penseurs et enfin qu’il faut plus faire confiance à dieu et à la Bible pour prendre des décisions. Ce qui ne peut que réjouir son électorat de chrétiens fondamentalistes et une partie des parlementaires et élus régionaux du parti Républicain. Le premier geste symbolique du nouveau président avait été de faire disparaitre toutes les informations relatives aux changements climatiques du site internet de la Maison Blanche une minute après le début de son intronisation le 20 janvier 2017. Logique après une campagne électorale au cours de laquelle il avait qualifié le réchauffement climatique de « canular inventé par les Chinois pour ruiner l’industrie des Etats-Unis ».

Retour du créationnisme dans les écoles

L’épuration idéologique en cours concerne également l’enseignement et la réhabilitation du credo créationniste dans les écoles et les lycées, et une liste de ce qu’il ne faut plus dire aux élèves est en cours de préparation. Mais la censure a évidemment commencé par la sphère de l’environnement et du climat. Elle a aboutit au retrait des USA de l’accord climatique de Paris, mais surtout au démantèlement en cours des organismes scientifiques et techniques en charge de toutes les questions environnementales et de protection. Le plus spectaculaire, sans doute le plus grave, est la prise en main de l’Agence Fédérale de l’Environnement, ministère de l’environnement, dont la direction a été confiée à Scott Pruitt, ex-ministre de la justice de l’Etat d’Oklahoma et connu pour être un climato-sceptique militant et adversaire de tout contrôle des normes de pollution de l’eau ou de l’air au nom de la liberté.

La bible et Jésus au pourvoir

Ce personnage, qui récemment encore citait publiquement la Bible et la vie de Jésus pour justifier ses décisions, a commencé par décapiter son administration et à supprimer tous les dossiers sur le climat librement consultables par le public sur le site de l’agence. Ses choix annoncés et les pressions exercées, ont entrainé le départ de plus de 700 personnes depuis l’arrivée de Trump au pouvoir ; essentiellement des scientifiques et des chercheurs, mais aussi neuf directeurs de département. La plupart n’ont pas été remplacés et seuls neuf nouveaux scientifiques ont été embauchés. La loi de finances fédérale 2018 étant toujours en cours de discussion, c’est-à-dire risquant encore de nouvelles coupes dans sa partie environnement à la demande des élus Républicains, le budget de l’Agence de l’année prochaine devrait être inférieur à ce qu’il était au début des années 80.

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