Group Nabla : Chronique de deux étés

Le collectif belge Group Nabla interroge avec finesse l’idée du bonheur et ses évolutions.

Anaïs Heluin  • 18 juillet 2018 abonné·es
Group Nabla : Chronique de deux étés
© Photo : hubert amiel

Ê tes-vous heureux ? » « Comment te débrouilles-tu avec la vie ? » Posées à différentes personnes dans Chronique d’un été, documentaire de l’ethnologue Jean Rouch et du philosophe Edgar Morin tourné en 1960, ces questions simples qui appellent des réponses complexes sont, pour Justine Lequette et les quatre comédiens du Group Nabla, un pont idéal entre hier et aujourd’hui.

Ce jeune collectif belge retient en effet dans son premier projet les aspects les plus intemporels du film, qualifié à l’époque par l’ethnologue d’« expérience nouvelle de cinéma-vérité ». J’abandonne une partie de moi que j’adapte interroge ainsi nos perspectives actuelles, nos utopies.

Dans un décor modulable où trône une bibliothèque, Léa Romagny, perchée sur une balançoire, ouvre la pièce sur un ton enfantin. En quelques mots, son regard à la fois naïf et lucide de petite fille sur le monde adulte renseigne sur le rapport des jeunes artistes au documentaire de leurs aînés. Sur leur manière très libre, non dénuée d’une part critique, de s’inspirer d’une démarche qui a fait date dans l’histoire du cinéma pour faire leur entrée dans le monde du théâtre.

Entre passé et présent, mêlant au scénario du film de 1960 des matériaux contemporains – la pièce Je te regarde d’Alexandra Badea et deux documentaires de Pierre Carles, Christophe Coello et Stéphane Goxe sur le travail –, le Group Nabla se révèle maître dans l’art de réactiver l’héritage qu’il s’est choisi.

L’implication de tous les comédiens dans l’écriture du spectacle nourrit une joie manifeste d’être au plateau, malgré des constats plutôt pessimistes. Après un saut temporel, le monologue néolibéral d’un patron marque en effet une parfaite continuité avec les souffrances ouvrières et étudiantes exprimées auparavant. Lesquelles auguraient d’un vent nouveau…

J’abandonne une partie de moi que j’adapte, Théâtre des Doms, 19 h 30, jusqu’au 26 juillet, 04 90 14 07 99.

Théâtre
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