Qui a peur du fantôme de François Hollande ?

L’ancien chef de l’État ne manque aucune occasion de placer son grain de sel. Mais reste d’abord un fervent défenseur… de lui-même.

Agathe Mercante  • 4 septembre 2018 abonné·es
Qui a peur du fantôme de François Hollande ?
© photo : CARL COURT/AFP

Rentrée politique ou rentrée littéraire ? Pour la 47e séance de dédicace de son livre Les Leçons du pouvoir, François Hollande était le 31 août à Cherbourg, fief de son ami et dernier Premier ministre Bernard Cazeneuve. Voilà pour la rentrée littéraire. Pour l’occasion, il a discouru devant la presse et des militants du PS, égratignant pêle-mêle Sarkozy, Trump, Mélenchon et bien sûr son successeur à la présidence, Macron. Voilà pour la rentrée politique. « J’ai beau dire que je ne suis jamais “sorti”, si ce n’est de l’Élysée, a-t-il affirmé. Je ne suis jamais parti de la vie politique. »

De fait, en l’espace d’un an, l’ancien chef de l’État a déjà donné 32 interviews, et il ne manque aucune occasion de placer son grain de sel. Il y a peu, il avait commenté sur Europe 1 la démission de Nicolas Hulot d’un « il a eu raison ». Mais Hollande reste d’abord un fervent défenseur… de lui-même. À Cherbourg, il s’est de nouveau félicité de son action à la tête de l’État : « C’est nous [les socialistes] qui avons relancé la croissance. » Un tacle à l’intention d’Emmanuel Macron – sans jamais le nommer. « Un président travaille toujours pour son successeur, même si ce dernier ne le remercie pas… »

De quoi accréditer la thèse du retour de celui qui, en décembre 2016, avait abandonné l’espoir d’être réélu ? La rumeur enfle. Les noms de domaines Hollande2022.fr et Hollande2022.com ont même déjà été achetés, et les quelques fidèles hollandistes restants n’ont pas ménagé leur peine durant l’été. Au Figaro, le député socialiste de l’Orne Joaquim Pueyo répondait le 15 août : « Hollande 2022 ? Oui, ça me parle ! »

Au sein du très mal en point PS – une décomposition dont Hollande est responsable –, des voix s’élèvent pourtant. « Ceux qui plaident pour un retour de François Hollande sont totalement décorrélés de la réalité du pays », prévient Emmanuel Maurel. S’ils viennent en nombre aux séances de dédicace, les Français ne sont que 17 % à souhaiter son retour (1). Un piètre résultat qui ne semble pas arrêter l’ex-président de 64 ans. En ligne de mire, les élections européennes. Et Hollande de critiquer « une certaine gauche » qui trouve que « le régime de Nicolás Maduro n’est pas si mal ». Jean-Luc Mélenchon appréciera.

À ce jeu du retour, les autres anciens présidents se sont essayés… et ont perdu. Giscard, devenu « ex » à 55 ans, bien qu’il ait collectionné les mandats locaux, n’est jamais sorti de l’ombre où la victoire de Mitterrand l’avait précipité en 1981. Plus récemment, Sarkozy, « ex » à 57 ans, a essuyé une retentissante défaite à la primaire de la droite, battu par son ancien « collaborateur » Fillon. Comme bien des châteaux, le palais de l’Élysée a ses fantômes. Effrayants, gênants, agaçants peut-être : pour autant, ils ne reviennent pas du monde des morts.

(1) Enquête Ifop pour Le Figaro du 22 août.

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