Paul Ariès : « La gratuité, un nouvel élan pour la gauche »
Mettre le « commun » et le non-marchand au cœur des politiques publiques constituerait un puissant levier pour la transition sociale, écologique et démocratique, défend Paul Ariès. Entretien.
dans l’hebdo N° 1532-1534 Acheter ce numéro

Dix ans après la première édition, en 2009, se tient à Lyon, samedi 5 janvier, le 2e Forum national de la gratuité. À l’initiative, Paul Ariès, figure intellectuelle de la décroissance, proche des courants de la gauche écologiste, creuse le sillon d’une idée-force : faire du principe de gratuité un outil pour contrer l’avancée de la marchandisation, qui grignote inexorablement l’espace des services publics et des biens communs. L’idée ne manque pas de percuter la logique ambiante : qui va financer ? La valeur des biens et des services va-t-elle se dissoudre ?
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Cette gratuité est aux antipodes des fausses aubaines de stratégies commerciales qui dérobent de la main droite ce qu’elles semblent offrir de la gauche aux consommateurs. Ni « robinet ouvert » ni « rasage gratis », elle se veut ferment de transformation de la société, un principe de politiques publiques ajusté en vue de réduire les inégalités, d’accélérer la transition écologique et de dynamiser la démocratie participative. Et l’idée éveille un réel intérêt au sein de la gauche et de l’écologie, comme en témoignent les signataires de l’appel « Vers une civilisation de la gratuité » lancé en octobre dernier (1).
Les politiques publiques ont le plus souvent recours à la gratuité pour soulager les charges des plus précaires. En quoi votre approche se distingue-t-elle de telles mesures d’accompagnement ?
Paul Ariès : Les mesures sociales qui vont jusqu’à la gratuité pour les seuls pauvres sont pour l’essentiel des roues de secours permettant d’intégrer les exclus à la marge de la société. Ces tarifs sociaux constituent certes une redistribution (marginale) des richesses,