Tripoli, 1911

Arrêt sur images autour d’un conflit oublié, photographié par Gaston Chérau.

Jean-Claude Renard  • 21 février 2019 abonné·es
Tripoli, 1911
© crédit photo : DR

Novembre 1911. D’abord fonctionnaire puis romancier, journaliste, chroniqueur et photographe, l’encore fringant Gaston Chérau (1872-1937) est missionné par le quotidien Le Matin pour couvrir la guerre entre l’Italie et l’Empire ottoman sur l’actuel territoire de la Libye. Voilà un moment que Chérau partage ses impressions de voyages auprès de ses lecteurs. À Tripoli, il se joint aux journalistes déjà présents en nombre, à un moment où les Transalpins subissent leurs premiers revers, répliquant sauvagement par une politique de terreur, et notamment l’exécution sommaire d’un millier de Tripolitains, femmes, enfants et vieillards compris.

Chérau restera six semaines sur place. Cadrant « les atrocités turco-arabes », un hôpital italien et des campements bédouins, la construction de tranchées, une cérémonie de remise de médailles, la bataille d’Aïn-Zara, la pendaison publique de quatorze Arabes, les ravages du choléra, d’autres exécutions et d’autres combats encore…

L’ouvrage Réveiller l’archive d’une guerre coloniale se veut un témoignage dans la fleur des nerfs, accompagné d’articles, d’une correspondance de l’écrivain avec sa femme et d’un court récit publié en 1926, Sur le trésor des caravanes, relatant cette expérience tripolitaine. Il rassemble plus de deux cent vingt clichés (de qualité inégale) exhumés par Pierre Schill, qui revient sur « la fabrique de l’actualité » et sur un correspondant de guerre « placé sous le double contrôle du belligérant et de la rédaction ».

Une exhumation historique à laquelle s’ajoute une interprétation de l’archive par des artistes contemporains, du chorégraphe Emmanuel Eggermont à la plasticienne Agnès Geoffray, tous deux attachés à l’exploration du passé.

Réveiller l’archive d’une guerre coloniale, Pierre Schill, Créaphis éditions, 480 pages, 35 euros.

Cinéma
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