Un mauvais pas

Le néonazi de Christchurch a été biberonné aux mêmes discours dégueulasses dont certains tartuffes médiatiques se sont faits les promoteurs depuis vingt ans.

Sébastien Fontenelle  • 19 mars 2019 abonné·es
Un mauvais pas
© photo : chaussures représentant les victimes du terroriste néo-nazi de Christchurch en Nouvelle-Zélande. crédit : MARTY MELVILLE / AFP

Ces marchand·e·s de haine (1) vissé·e·s dans les médias mainstream qui, depuis vingt ans, vomissent quotidiennement ou presque à longueur d’éditoriaux et de talk-shows (et en les vernissant éventuellement d’un enduit « républicain » ou « universaliste ») leurs aversions antimusulmanes – liste non exhaustive ; ces sycophantes dévergogné·e·s inaccessibles à la plus élémentaire décence qui, depuis toutes ces années, dressent régulièrement des listes d’« islamo-gauchistes » (toi, moi, nous, Edwy Plenel) et les présentent comme autant de « complices » ou d’« idiots utiles » du terrorisme jihadiste (mais qui, bien sûr, et pour cause, n’ont jamais – jamais – produit le moindre élément probant au soutien de leurs calomnies et de leurs diffamations), regarde-les, après la tuerie de Christchurch, Nouvelle-Zélande, où un terroriste d’extrême droite a froidement massacré des dizaines de musulman·e·s.

Regarde-les quand il apparaît, dans l’immonde « manifeste » que ce néonazi a rédigé avant de tuer, qu’il a aussi été biberonné aux mêmes discours dégueulasses, à base d’« islam sans gêne » ou de « grand remplacement », dont ils se sont faits depuis deux décennies, et plus ou moins ouvertement, les promoteurs infatigables (2).

Regarde-les quand ils découvrent consternés que ce néonazi usait des mêmes vocables infects dont ils ont patiemment banalisé l’usage – et se trouvent tout soudain pris d’un très subit accès de cette même délicatesse (3) dont ils se sont depuis si longtemps exonérés pour mieux disqualifier qui ne pensait pas comme eux. Regarde-les supplier, quand ils voient dans la prose de ce néonazi les mêmes mots, exactement, dont ils ont partout normalisé l’emploi dans leurs journaux et leurs radios (4), qu’on ne leur inflige pas, surtout, l’affront de l’un de ces « amalgames » sous lesquels ils nous ensevelissent depuis deux décennies.

Rassurez-vous, tartuffes : vous pouvez très facilement vous sortir de ce mauvais pas. Dites-nous vite où et quand les tueurs de Daech se seraient réclamés d’Edwy Plenel, ou de n’importe qui parmi celles et ceux que vous accusez depuis tant d’ans d’être comme lui « des complices de l’islamisme » – et dans l’instant nous arrêterons, c’est promis et juré, de vous rappeler que des terroristes néonazis revendiquent bien, eux, et très distinctement, d’avoir trouvé de l’inspiration dans les discours immondes que vous poussez depuis vingt ans.


(1) Pardon, mais là je ne suis pas de très bonne humeur.

(2) Rien de bien neuf, pour dire le vrai, puisque déjà un autre assassin de masse d’extrême droite, Anders Breivik, avait, il y a huit ans, laissé derrière lui, avant de tuer en Norvège 77 personnes, un abject bréviaire, nourri notamment de quelques fortes proférations d’un de leurs penseurs de chevet : l’excellent M. Finkielkraut, grand pourfendeur obsessionnel du « mouvement islamo-gauchiste ».

(3) On peut dire aussi pudeur, si tu préfères.

(4) Fussent-elles d’État : salut à toi, France Culture.

Publié dans
De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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