L’armée d’Erdogan, enterre le Rojava à Ras Al-Aïn
En envahissant le territoire administré par les Kurdes en Syrie, les militaires d’Erdogan, flanqués de milices syriennes, ont bombardé les civils, poussant ceux-ci au départ. Pillages et brutalités ont été légion.
dans l’hebdo N° 1578 Acheter ce numéro

Un hurlement rompt le silence qui régnait dans l’hôpital Shehid Legerin de Tell Tamer, à quelques kilomètres de la ligne de front, dans le Rojava, le Kurdistan syrien. La journée s’achève sur un cri de désespoir. C’est celui d’une mère, d’une épouse, d’une fille, qui apprend la mort d’un fils, d’un mari, d’un père.
Un groupe de femmes entre dans -l’hôpital, les yeux mêlés de sang et de larmes. Elles viennent voir la dépouille d’un proche, décomposé après être resté sous les gravats à la suite des bombardements turcs. Il est recouvert d’un plastique noir. Les femmes crient : « Pourquoi ? » Les médecins volontaires arrivent pour découvrir le corps. Un homme s’approche, levant les mains au ciel. Puis il prend sa tête entre ses mains et la serre très fort, comme s’il essayait de contenir sa douleur. La scène est déchirante. Des femmes perdent connaissance. L’odeur est nauséabonde. Comme d’autres cadavres, celui-ci est désinfecté et transporté dans la chambre froide d’un fourgon. Cette image symbolise la tragédie qui suit une attaque surprise.
Nous sommes le jeudi 18 octobre, un jour après que la Turquie a déclaré un cessez-le-feu de 120 heures. Les cadavres ne cessent d’arriver à l’hôpital Legerin. Depuis dix jours, la région du Rojava est décimée par l’opération « Source de paix » déclenchée par les Turcs contre les Forces démocratiques syriennes (FDS), la coalition menée par les Kurdes du YPG (Unités de protection du peuple). Encerclée, la petite ville de Ras Al-Aïn, qui jouxte la -frontière, vit au rythme des tirs. Ici, pas de trêve. La cité était le dernier rempart de la résistance kurde et des FDS contre l’invasion des milices de l’« Armée nationale syrienne » (ANS),