Avec les femmes des piquets de grève

Une délégation d’élues de gauche s’est rendue, le 13 janvier, auprès des grévistes de la RATP de Pantin.

Agathe Mercante  • 15 janvier 2020 abonné·es
Avec les femmes des piquets de grève
© Le collectif féministe Sheeky et Attac à la manifestation parisienne du 11 janvier.Emeric Fohlen/NurPhoto/AFP

Un grand sapin, abandonné dans les rues de Pantin, fait office de carburant pour le brasero. À 6 h 30, sur l’avenue Jean-Jaurès, à quelques encablures de Paris, il apporte un peu de chaleur, quelques crépitements et beaucoup de fumée aux grévistes du centre de bus RATP de Flandres. Depuis le 5 décembre, les salarié·es se sont relayé·es pour que la flamme qui les anime ne faiblisse pas. « Le mot d’ordre, c’est de tenir jusqu’au retrait total de la réforme des retraites », pose Nadia Belhoum, machiniste. Ce lundi matin, les grévistes du centre ont reçu le soutien d’une délégation transpartisane d’élues et de militantes de gauche : Clémentine Autain (députée La France insoumise), Esther Benbassa (sénatrice Europe Écologie-Les Verts), Manon Aubry (eurodéputée LFI), Sandra Regol (secrétaire nationale adjointe d’EELV), Sophie Taillé-Polian (sénatrice Génération·s), les historiennes Laurence De Cock et Mathilde Larrère…  « On ne parle pas assez des femmes, or ce sont souvent elles qui tiennent les piquets de grève », explique Manon Aubry. D’autant que la réforme ne fera pas de ces dernières les « grandes gagnantes », comme le martèle la communication gouvernementale. « Calculer la pension sur toute la carrière ne bénéficiera pas aux femmes », estime l’eurodéputée. « Nous sommes plus touchées par les carrières hachées et les trimestres incomplets… Le bonus du troisième enfant reversé au couple et non à la mère, c’est un cadeau fait aux hommes, qui gagnent en moyenne 17 % de plus que les femmes », rappelle Esther Benbassa.

Une visite appréciée, mais dont les grévistes n’attendent rien. « Des politiques, on en a vu quelques-uns : Éric Coquerel (LFI), Olivier Besancenot (NPA)… » liste Nadia Belhoum. Pas question, pour la délégation féminine, de faire du prosélytisme. Du moins, pas pour leurs chapelles. « Pour l’heure, la faiblesse et l’atomisation relatives de la gauche sociale et écologiste ne permettent pas d’ouvrir une perspective. Mais le mouvement donne du grain à moudre. La justice sociale et l’égalité sont au cœur des revendications », écrivait Clémentine Autain dans un post sur Facebook le 11 janvier. Pour ce qui est du féminisme en revanche… Réunies pour une photo de groupe, elles entonnent l’Hymne des femmes : « Levons-nous femmes esclaves. Et brisons nos entraves. Debout, debout, debout ! »

« C’est dommage qu’elles ne soient pas venues avec 200 militantes et militants, plaisante Manuel Varol, salarié de l’hôtellerie et fervent soutien du mouvement social, cela aurait fait des cotisations pour la caisse de grève. » Car les moyens, chez les grévistes, viennent à manquer. « On alterne, on prend quelques congés payés pour continuer », admet une salariée. « Ça commence à devenir un peu difficile financièrement », explique une autre. On préfère rire des annonces du Premier ministre – « âge pipeau », « âge mytho », entend-on devant le centre RATP – pour ne pas pleurer. Après 40 jours de mobilisation, le gouvernement ne recule toujours pas. « Mais est-ce qu’ils viennent du même monde que nous, ces gens-là ? » s’interroge une gréviste. « Je parie qu’Édouard Philippe ne connaît même pas le prix d’une baguette de pain et pourtant c’est lui qui décide de notre avenir », déplore une autre.

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