Survivantes au temps du Covid 3/4 : Bernadette, Centrafrique

Après avoir affronté la guerre, la stigmatisation, l’exil… les rescapées de violences sexuelles en zones de conflit doivent aujourd’hui affronter un nouvel ennemi : la pandémie. En Afrique, elles témoignent de leur précarité sanitaire et économique.

Partager :
Survivantes au temps du Covid 3/4 : Bernadette, Centrafrique
© Bernadette interpelle les organisations internationales sur la violence des groupes armés.Photo : Raegan Hodge of the Dr. Denis Mukwege Foundation

Bernadette, Centrafrique

Face à la pandémie, le gouvernement a mis en place des restrictions de circulation et de rassemblement. Ces mesures sont dans l’intérêt de toute la population, mais elles ont aussi pour effet d’isoler et de précariser davantage les survivantes. Or, une victime de violences sexuelles ne doit pas être abandonnée. Nous sommes fortes, mais, quand nous sommes seules, les souvenirs reviennent. Le viol, c’est un événement de grand effroi.

Au début de la crise, j’étais complètement bloquée. La situation actuelle, avec le nombre de contagions qui augmente, la hausse des prix, nos enfants qui ne peuvent plus aller à l’école, apporte du stress et de la peur, qui s’ajoutent aux souvenirs. Nous avons besoin d’échanger entre nous. Sema a mis en place un groupe WhatsApp sur lequel nous nous soutenons. Mais ça, ce n’est possible que pour les femmes qui ont de l’électricité, car il est plus difficile aujourd’hui de recharger son téléphone sur le bord de la route. Je vis dans la capitale, mais de nombreuses survivantes sont isolées dans des régions reculées.

Ici, les groupes armés agissent encore sur la majorité du territoire ; les victimes de violences sexuelles, déjà ostracisées, sont des proies, car les agresseurs pensent qu’ils peuvent faire ce qu’ils veulent. Il faut que les organisations internationales qui interviennent dans le pays aient conscience de la situation extrêmement difficile de ces femmes. Avec le Mouvement des survivantes en Centrafrique (Mosuca), dont je suis la secrétaire générale, nous prévoyons une action pour la Journée internationale contre les violences sexuelles dans les conflits, le 19 juin. Dans chaque région, nos référentes vont se déplacer en 4×4 et interpeller au mégaphone les autorités locales pour qu’elles prennent leurs responsabilités vis-à-vis des populations vulnérables. Nous diffuserons notre message à la radio au même moment. Nous allons aussi nous adresser aux survivantes pour qu’elles sachent qu’elles ne sont pas oubliées. Partout dans le monde, les survivantes ont les mêmes problèmes. Avec Mosuca et Sema, nous nous sommes unies pour être plus fortes ensemble. Nous identifions les besoins. Mais, pour faire face, nous demandons du soutien.

Monde
Temps de lecture : 2 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Des deux côtés de l’Atlantique, la social-démocratie n’est jamais finie (mais c’est pas jojo)
Analyse 6 juin 2025

Des deux côtés de l’Atlantique, la social-démocratie n’est jamais finie (mais c’est pas jojo)

Les gauches sont bien à la peine à l’échelle mondiale. Trop radicales, elles perdent. Les moins radicales sont diabolisées. Toutes sont emportées dans un même mouvement. Pourtant, dans un monde où les vents de l’extrême droite soufflent fort, la social-démocratie n’a pas encore perdu la partie.
Par Loïc Le Clerc
Avoir moins de 20 ans dans la bande de Gaza
Récit 4 juin 2025 abonné·es

Avoir moins de 20 ans dans la bande de Gaza

Plus de 50 000 personnes au sein du territoire enclavé ont été tuées ou blessées par l’armée israélienne depuis le 7-Octobre. Mais le sort des survivants doit aussi alerter. Privée d’éducation, piégée dans un siège total au cœur d’une terre dévastée, toute la jeunesse grandit sans protection, sans espoir.
Par Céline Martelet
À Gaza, « les enfants sont en train d’être exterminés »
Entretien 4 juin 2025 abonné·es

À Gaza, « les enfants sont en train d’être exterminés »

Khaled Benboutrif est médecin, il est parti volontairement à Gaza avec l’ONG PalMed. La dernière fois qu’il a voulu s’y rendre, en avril 2025, Israël lui a interdit d’entrer.
Par Pauline Migevant
En France, la nouvelle vie des enfants de Gaza
Témoignages 4 juin 2025 abonné·es

En France, la nouvelle vie des enfants de Gaza

Depuis le début de la guerre dans l’enclave palestinienne, les autorités françaises ont accueilli près de cinq cents Gazaouis. Une centaine d’autres ont réussi à obtenir des visas depuis l’Égypte. Parmi ces réfugiés, une majorité d’enfants grandit dans la région d’Angers, loin des bombardements aveugles de l’armée israélienne.
Par Céline Martelet