Xavier Vigna : « Envisager une alternative tant espérée dans les années 1970 »
Spécialiste du mouvement ouvrier, l’historien Xavier Vigna revient sur la genèse sociale et intellectuelle de la victoire de François Mitterrand le 10 mai 1981. En soulignant la conquête des enjeux culturels qui l’a rendue possible.
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© MICHEL CLEMENT/AFP
Professeur d’histoire contemporaine à l’université Paris-Nanterre, Xavier Vigna travaille depuis plus de vingt ans sur le mouvement et les mondes ouvriers, en particulier durant les « années 68 » (1962-1981), concept forgé par l’historienne Michelle Zancarini-Fournel, qui dirigea sa passionnante thèse de doctorat, publiée sous le titre L’Insubordination ouvrière dans les années 68. Essai d’histoire politique des usines (Presses universitaires de Rennes, 2007).
Outre le rôle de la classe ouvrière et de ses organisations dans la victoire du candidat du Parti socialiste à la présidentielle de 1981, Xavier Vigna analyse les multiples causes, en particulier culturelles, qui ont permis à la gauche de l’emporter. Portant alors d’immenses espoirs pour, enfin, réduire les inégalités et véritablement « changer la vie »…
Doit-on parler de réel changement en 1981 ? Les deux premières années ont-elles été marquées par un véritable espoir ?
Xavier Vigna : J’ai un souvenir précis du 10 mai 1981 au soir : des militants pleuraient de joie dans la Bourse du travail bondée d’une grande ville populaire de province. Car, il faut le rappeler, la gauche parlementaire n’avait pas exercé le pouvoir depuis 1958 et l’instauration de la Ve République. Le pays était ravagé par une crise économique qui entraînait notamment une explosion du chômage. Le décès récent de Valéry Giscard d’Estaing n’a pas entraîné de rappel quant au bilan économique de son septennat : environ un