Bure : « On t’enverra une invitation quand le projet tout pourri Cigéo sera abandonné ! »

Alors que le troisième et dernier jour d’audience avait lieu pour les sept opposants au projet d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure (Meuse), la mobilisation place Saint-Pierre à Bar-le-Duc était plus festive que jamais : kermesse et pot de départ ironique au programme.

Amanda Jacquel  • 4 juin 2021
Partager :
Bure : « On t’enverra une invitation quand le projet tout pourri Cigéo sera abandonné ! »
© Photos : Amanda Jacquel

Une Grande kermesse, voilà le programme de ce 3 juin 2021 sur la place Saint-Pierre, devant le Palais de Justice où se tiennent les dernières heures du procès avant le rendu du jugement en septembre. Les prévenu-es avaient souhaité une mobilisation en fête, c’est chose faite.

© Politis

Ce matin, les militant-es sont invité-es à une « pêche au nuke », des fléchettes, un entraînement au lancé de pavés (dans un panier de basket), à « attraper le nucléaire sans se faire attraper » ou encore à clouer la tête de l’Andra.

© Politis
© Politis

Comme pour poursuivre cette ambiance festive, la friture se fait sentir au déjeuner pendant qu’un groupe se forme pour danser devant la DJette installée sous un chapiteau.

© Politis

Puis, un rassemblement en soutien au squat de La Borie (Gard), évacué dans la matinée du 2 juin 2021 se forme très rapidement. Ce lieu était occupé en opposition à un projet de barrage depuis plus de 30 ans.

© Politis

En Meuse, cette joie dans la lutte et l’infusion d’un sentiment de célébration ont été soigneusement cultivés par les opposant-es à la lutte contre le projet d’enfouissement de déchets radioactifs.

D’ailleurs, cet après-midi après un rideau de pluie passager, une poignée endosse les chemises, les talons hauts et les tailleurs pour fêter le départ de David Mazoyer, ancien directeur de l’Andra (Agence nationale de gestion des déchets radioactifs).

© Politis

« Il y a cinq ans, Jean Paul Baillet quittait l’Andra. Aujourd’hui, c’est David Mazoyer. Mais nous on est toujours là ! » introduit une militante au micro, avant d’ironiser : « Ainsi, va la vie ! »

© Politis

Des petits fours sont concoctés pour l’occasion, le « champagne » est sabré devant le Palais de justice, et pour le départ de l’ingénieur une chanson a même été spécialement écrite par un groupe qui se présente comme le « David and the Mazoyer band », suscitant les rires de l’assemblée.

© Politis

« Libéré-es !!!! Mazoyer !!! » le groupe entame une reprise de la fameuse chanson du film d’animation « La Reine des Neiges ». Une performance où la musique mais aussi la chorégraphie, à rollers, fait aussi sourire. « Non je ne pleure pas ! Me voilà ! Oui je suis là ! Ailleurs en Lorraine… Fuir est pour toi le prix de la liberté… », concluent-ils avant de longs applaudissements.

© Politis

Les « collègues » imaginés de David Mazoyer défilent ensuite au micro pour un petit mot envers David. « David, tu pars et moi je reste. L’histoire se répète, je suis délaissé, et je marche seul dans le Bois Lejuc », déclame un pseudo Emmanuel Hance, ingénieur chargé des opérations foncières au sein de l’Andra.

Cher David, j’apprends aujourd’hui que tu as obtenu la mutation que tu espérais depuis quelques mois. Tu vas être muté… Ironie du sort pour un administrateur du nucléaire, non ?

Un autre s’avance : « Tu te rappelles nos commérages sur l’ancien maire de Mandres ? Qu’est-ce qu’on a pu rire… » L’occasion est trop belle pour ne pas épingler l’ancien directeur et à nouveau renverser le procès qui se joue au Tribunal et le recentrer sur la question nucléaire. « On note que tout le monde s’en va, même le juge Kevin Lefur va partir. Alors quoi ? On est pas bien en Meuse ? (…) Sans remords pour toutes les concertations qu’on a empêchées, celles où on enfumait ton boss à Paris… »

« C’est bien dommage qu’il s’en aille parce qu’avec Mazoyer on a pu déloger un bois, frapper des gens… J’espère qu’on pourra continuer à faire les fous sans que des procès n’arrivent. »

David Mazoyer est désormais attaché à la Dreal [Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement du Grand Est à Metz, NDLR]. Son remplaçant, Patrice Torres, aurait déjà un surnom local : « Une peau de hareng. »

Une habitante termine sur ces mots : « On t’enverra aussi une invitation à une grande fête quand le projet tout pourri sera enfin abandonné dans les années qui viennent. »

Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Pesticides : La Rochelle marche pour sa santé
Reportage 9 octobre 2024 abonné·es

Pesticides : La Rochelle marche pour sa santé

Le 12 octobre, les opposants à l’agrochimie défileront dans la cité maritime. Face aux alertes à répétition aux pollutions de l’air et de l’eau, des citoyens et des élus se sont mobilisés pour faire entendre leurs inquiétudes et défendre la transition agricole.
Par Sylvain Lapoix
« Écologie populaire » : le dernier coup de com’ de la Macronie
Écologie 4 octobre 2024 abonné·es

« Écologie populaire » : le dernier coup de com’ de la Macronie

Agnès Pannier-Runacher emprunte une expression du bréviaire de gauche pour en faire un coup de communication. Un élément de langage snobé par Matignon et totalement vidé de son sens politique.
Par Vanina Delmas
Juliette Rousseau : « J’essaye de détricoter les mythes de la ruralité »
Entretien 25 septembre 2024 abonné·es

Juliette Rousseau : « J’essaye de détricoter les mythes de la ruralité »

Comment porter une parole sensible, de gauche et féministe dans un milieu rural d’apparence hostile ? L’autrice de Péquenaude utilise sa plume tantôt douce, tantôt incisive pour raconter sa campagne bretonne natale, où elle est retournée vivre, en liant les violences sociales, patriarcales et écologiques.
Par Vanina Delmas
En Sicile, le manque d’eau crée la spéculation
Reportage 25 septembre 2024 abonné·es

En Sicile, le manque d’eau crée la spéculation

Touchée par une sécheresse historique, l’île italienne est plongée en état d’urgence depuis le mois de mai. Face à l’absence totale d’anticipation des autorités, tous les habitants ne sont pas logés à la même enseigne.
Par Augustin Campos