Législatives : L’union qui peut changer la donne

Le bon score de Jean-Luc Mélenchon et la faiblesse des autres candidats ont forcé à la réconciliation des gauches, désormais incarnée par la Nouvelle Union populaire écologique et sociale.

Michel Soudais  • 4 mai 2022 abonné·es
Législatives : L’union qui peut changer la donne
© Antonin Burat / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Après la décomposition, la recomposition ? À gauche, la conclusion d’un accord entre La France insoumise (LFI) et Europe Écologie-Les Verts (EELV), dimanche soir, a ouvert la voie à la mise en place d’« un large rassemblement »_ appuyé, précise le communiqué commun des deux organisations, « sur la dynamique de la campagne présidentielle de l’Union populaire ouvrant la voie à une majorité à l’Assemblée nationale ». Une union de la gauche nouvelle mouture basée sur un programme et une stratégie partagés qui permettent un partage des circonscriptions.

Après une bonne semaine de négociations au cours de laquelle LFI a rencontré séparément EELV, le Parti communiste (PCF), le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) et entamé des discussions avec le Parti socialiste (PS), cette annonce a plongé dans une certaine euphorie des gauches plus habituées à être concurrentes et divisées. Et relancé des discussions suspendues avec le PS et le PCF.

Plus tôt dans la journée de ce 1er Mai, lors d’une prise de parole devant des centaines de personnes massées place de la République, à Paris, avant la traditionnelle manifestation de la Fête du travail, Jean-Luc Mélenchon avait démenti toute volonté d’hégémonie, une accusation largement répandue dans la presse : _« Nous avons donné la garantie à chacun de ceux qui viennent discuter avec nous qu’ils auront un groupe à l’Assemblée nationale », a-t-il affirmé. Non sans préciser que tous auront leur « propre association de financement » et que « tous obtiennent dans la discussion bien davantage que le résultat proportionnel de l’élection présidentielle ». Si les formations en discussion ont défilé ensuite séparément, les poignées de mains et accolades entre dirigeants écolos, socialistes, communistes et insoumis ont été très remarquées, la plus médiatisée étant celle entre Olivier Faure, le premier secrétaire du PS, et Jean-Luc Mélenchon au milieu d’une foule compacte. Image rare, perçue par tous, sur cette place parisienne, comme annonciatrice d’une probable union. Les 22 % de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle, associés à la faiblesse de toutes les autres forces, en dessous de 5 %, ont forcé les réconciliations.

L’accolade entre Olivier Faure et Jean-Luc Mélenchon n’est pas passée inaperçue.

Mardi, à l’heure de notre bouclage, les discussions touchaient à leur terme. Le coordinateur de l’exécutif national du PCF, Igor Zamichieï, venait d’annoncer que l’accord avec LFI était sur le point d’être « finalisé ». Les deux formations se sont entendues sur la « stratégie, le programme et les circonscriptions », affirmait-il, et ces termes devaient être soumis en fin d’après-midi au Conseil national du parti pour validation, après consultation des conseils départementaux. Avec le PS, un accord était initialement espéré pour lundi soir ou dans la nuit, mais, mardi matin, « il restait certains réglages », admettait sur Europe 1 Pierre Jouvet, le chef des négociateurs socialistes, qui s’est réjoui de pouvoir montrer que « les gauches ne sont pas si irréconciliables que cela ». Quelques blocages subsistaient « sur le fond, mais essentiellement sur les circonscriptions », selon Manuel Bompard, le principal négociateur de LFI ; pour « des questions d’incarnation dans chacun de nos territoires », a précisé sur Sud Radio Stéphane Troussel, le président PS du conseil départemental de Seine-Saint-Denis.

Le PS entend préserver ses vingt-cinq députés sortants et obtenir d’autres circonscriptions gagnables. Sa direction doit montrer qu’elle se fait « respecter » alors que son rapprochement avec LFI est contesté par un courant minoritaire et des figures historiques telles que François Hollande, l’ancien premier secrétaire Jean-Christophe Cambadélis ou encore Stéphane Le Foll. En interne et sur les réseaux sociaux les débats entre socialistes sont vifs. À l’initiative du courant « Debout les socialistes », mené par Hélène Geoffroy, une pétition revendiquant un millier de signataires réclame une consultation des adhérents avant tout accord avec LFI. Celui-ci « pose aujourd’hui une question existentielle à la hauteur de celle qui traversa le congrès de Tours il y a 102 ans ». Pas moins !

Ces combats d’arrière-garde pourront générer ici et là des candidatures dissidentes, ils ne paraissent toutefois pas en mesure de faire échouer les négociations, les protagonistes, tant du côté PS que chez LFI, ayant répété vouloir conclure un accord.

S’il en est que cette coalition inquiète, ce sont bien les dirigeants des droites et leurs fidèles servants médiatiques. De François Bayrou à Jordan Bardella en passant par Éric Woerth, Jean-François Copé ou Guillaume Peltier, le tir de barrage pour tenter de préserver l’existence d’une « gauche de droite » à l’impuissance avérée impressionne. Même Emmanuel Macron s’y est mis : « La carpe n’est pas le lapin », a-t-il lancé lors d’un déplacement dans les Pyrénées.

De toute évidence, la date de sa cérémonie d’investiture, samedi 7 mai, n’a pas été arrêtée au hasard. Ce jour-là, la Nouvelle Union populaire écologique et sociale a prévu de tenir une convention nationale en Seine-Saint-Denis avec tous ses candidats. Une démonstration de force qu’Emmanuel Macron a choisi de concurrencer sur le terrain médiatique. Désignant implicitement son véritable adversaire.

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