Cinéma : Kinuyo Tanaka à sa juste place

L’œuvre exceptionnelle de la première cinéaste japonaise d’après-guerre est enfin rééditée.

Christophe Kantcheff  • 26 octobre 2022 abonné·es
Cinéma : Kinuyo Tanaka à sa juste place
Kinuyo Tanaka, lors du tournage de la "La lune s’est levée".
© Photo : Carlotta Films.

La postérité est-elle toujours bonne juge ? Quoi qu’il en soit, elle a parfois des retards à l’allumage. Longtemps, dans les dictionnaires du cinéma, Kinuyo Tanaka (1909-1977) suscitait l’intérêt pour son extraordinaire carrière d’actrice. Elle a en effet joué devant la caméra des plus grands, Ozu, Naruse ou Mizoguchi, avec lequel, en particulier, elle a tourné ses plus remarquables chefs-d’œuvre.

Coffret Kinuyo Tanaka, Carlotta (4 Blu-Ray ou 6 DVD), 65 euros.

Elle fut la comédienne la plus sollicitée et adulée du cinéma classique japonais. Une véritable star. Mais les films qu’elle a elle-même réalisés – six au total, entre 1953 et 1962, Lettre d’amour, La lune s’est levée, Maternité éternelle, La Princesse errante, La Nuit des femmes et Mademoiselle Ogin – étaient mentionnés rapidement.

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Kinuyo Tanaka, lors du tournage de La Lune s’est levée. (Photo : Carlotta Films.)

Ce ne sera plus le cas désormais. Ses films, ressortis en salle au début de cette année, paraissent aujourd’hui en DVD et Blu-Ray chez Carlotta. Ils sont le fait d’une réalisatrice exceptionnelle. Tant du point de vue du cinéma lui-même – avec un sommet, Maternité éternelle, aussi puissant formellement que ce qu’il montre d’une femme, gravement malade et amoureuse – que de la ténacité qu’il lui a fallu pour se muer en réalisatrice.

Première femme cinéaste d’après-guerre

Le milieu du cinéma japonais était en effet exclusivement masculin. Tanaka est la première femme cinéaste d’après-guerre. Une seule l’avait précédée, dans les années 1930 : Tazuko Sakane, dont l’unique film de fiction a été perdu.

Comme le souligne le documentaire de Pascal-Alex Vincent Kinuyo Tanaka, Une femme dont on parle, compris dans les suppléments, celle-ci n’aurait jamais pu réaliser ses films si elle n’était pas déjà comédienne. Ozu et Naruse lui ont prodigué des conseils. Mizoguchi, en revanche, ne voyait pas cette mue d’un bon œil. L’histoire et surtout Kinuyo Tanaka lui ont donné tort.

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