Le syndrome du patron de gauche
Arthur Brault-Moreau publie un livre important, qui s’attaque à un angle mort du camp progressiste : le management de gauche. Et qui conclut : syndiquons-nous !
dans l’hebdo N° 1729 Acheter ce numéro

Écrivons-le tout net : Le Syndrome du patron de gauche, qui paraît aujourd’hui, 27 octobre, est un livre important, ne serait-ce que parce qu’il s’attaque enfin à un sujet pour le moins sous-traité. À un angle mort du camp progressiste, où l’on oublie parfois que, dans « patron de gauche », il y a aussi « patron » – avec tout ce que cela peut induire de comportements problématiques et de souffrances au travail.
(1) Le Syndrome du patron de gauche, Arthur Brault-Moreau, Hors d’atteinte, 224 pages, 19 euros.
Arthur Brault-Moreau, l’auteur de ce « manuel d’anti-management » dont on voudrait citer chaque ligne ou presque, sait de quoi il parle : il a été embauché, à la fin de ses études, par une élue de gauche. Mais au fil du temps, écrit-il, « l’enthousiasme des premiers jours a laissé place […] au constat quotidien que la réalité de mon travail était très éloignée des valeurs défendues par mon employeuse ».
Arthur Brault-Moreau propose un amusant questionnaire, qui permet à tou·te un·e chacun·e de vérifier si son employeur ou son employeuse souffre du syndrome du patron de gauche. Par exemple, si, « tout en maintenant » d’irréprochables « référentiels révolutionnaires », un PDG « n’hésite pas à utiliser son pouvoir d’employeur pour […] sanctionner » des salarié·es, même si « ces pratiques ne sont pas légales » (mais « peu importe, parce que c’est lui le chef »).
Si « on se sent constamment tiraillé entre les discours du PDG et la réalité du travail ». Si « on a le sentiment qu’il faut doublement lutter, sur les conditions de travail et face au discours affiché ». Alors le doute n’est plus permis : le PDG en question est « un beau parleur-pipeauteur ». C’est-à-dire qu’il « aime faire de belles phrases », mais que « la beauté du verbe sonne faux tant ses pratiques y sont radicalement opposées ».
Pour l’auteur, « la forme d’action collective qu’est le syndicat apporte aussi des réponses aux problèmes posés par le management de gauche ».
En de tels cas, « toute la difficulté est de parvenir à faire un pas de côté, d’échapper au son du pipeau et de ramener le verbe à la réalité des conditions de travail ».
Arthur Brault-Moreau développe une passionnante réflexion en partant du constat que « l’analyse des conditions dans lesquelles vivent leurs salarié·es » n’est malheureusement « pas une priorité pour les organisations de gauche », et en nous invitant collectivement à ne plus « bouder » cette question.
Dans sa conclusion, l’auteur préconise une recette simple mais trop souvent oubliée au sein des structures professionnelles de gauche : « l’action syndicale ». Car, rappelle-t-il, « la forme d’action collective qu’est le syndicat apporte aussi des réponses aux problèmes posés par le management de gauche ».
Ainsi, « la présence d’un syndicat dans une organisation permet de rappeler l’existence d’un rapport salarial et d’une distinction entre l’employeur et les salariés, et […] que les enjeux internes, la gestion des membres et des salarié·es sont […] un critère qui renseigne beaucoup sur l’engagement » effectif d’un environnement professionnel réputé de gauche.
Puis de conclure : « Syndiquons-nous ! »
Chiche ?
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.
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