L214 dévoile la souffrance des poulets d’exportation

L’association de défense des animaux L214 rend publique une enquête filmée sur les conditions désastreuses d’un élevage de poulets bretons destinés aux pays du Golfe.

Lily Chavance  • 24 avril 2023
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L214 dévoile la souffrance des poulets d’exportation
© L214

L214 alerte à nouveau. Depuis 2008, cette association de défense de la cause animale a rendu publiques plus de 130 enquêtes révélant des conditions d’élevage et d’abattage des animaux toujours plus atroces. Rassemblant plus de 50 000 membres, elle participe activement au débat démocratique et révèle, par son expertise, de nombreux scandales. Sa dernière enquête est un coup de projecteur sur les conditions d’un élevage de poulets réservés à l’exportation.

À Sizun, dans le Finistère, cet élevage de 33 000 poulets, en contrat avec la coopérative Yer Breizh – appartenant à la région Bretagne et au géant LDC – fournit l’abattoir France Poultry de Châteaulin (Finistère) en poulets « exports ». Le numéro 1 du poulet français, le groupe LDC, notamment connu pour ses marques Le Gaulois, Maître Coq ou Marie – qui dénonce pourtant publiquement les importations de volaille en France, participe activement à l’exportation des millions de poulets à travers le monde.

26 animaux au mètre carré

L’association a filmé les conditions désastreuses de cet élevage intensif : 26 poulets entassés au mètre carré sur leurs excréments et en proie aux maladies dans un bâtiment insalubre. Les images choquent : plumages abîmés, souillés par les déjections, poulets agonisants, décès des plus jeunes… L214 a découvert des seaux et un congélateur remplis d’une centaine de cadavres d’animaux. La vidéo brute est disponible ici : âmes sensibles, s’abstenir.

L214 poulets export doux
L214 poulets export doux

Pour les nourrir, du soja génétiquement modifié. L’association a pu consulter des documents mentionnant les dizaines de tonnes livrées chaque semaine. Interdit à la culture en France depuis 2008, le soja, principale cause de déforestation en Amérique Latine, est importé massivement et principalement du Brésil.

Une fois emmenés à l’abattoir, ces poulets sont égorgés, congelés, puis transportés en porte-conteneurs jusqu’en Arabie Saoudite pour être commercialisés sous la marque « Doux ». Certifiée « hallal » depuis plus de 50 ans, ses activités d’abattage et de transformations sont réparties sur le territoire français. Les produits sont ensuite exportés dans une centaine de pays dans le monde dont la péninsule arabique.

Par cette enquête, L214 remet aussi en cause les modes de communication de la vente de ces produits et dénonce une vive hypocrisie. Le groupe saoudien Almunajem assure la commercialisation et revendique dans ses publicités un « savoir-faire français ». Un poulet, mis en scène dans l’encart publicitaire, chantonne : « Dans les fermes Doux, nous offrons les meilleures conditions d’élevage. »

Malheureusement, ces pratiques ne sont pas nouvelles. En 2018, l’entreprise Doux a été vendue à la suite d’une condamnation et d’une amende de 80 millions d’euros. Le volailler n’avait pas respecté la teneur en eau des poulets vendus à l’export entre 2010 et 2012. Chargeant en eau ses volailles, et de fait, augmentant artificiellement leur poids, le groupe percevait davantage de subventions.

Communication mensongère et plainte

Suite à cette affaire, la marque intégrait le groupe LDC et répartissait les activités d’élevage et d’abattage entre plusieurs acteurs : LDC, la région Bretagne, le groupe agroalimentaire Almunajem et les coopératives Triskalia (Euroden désormais).

L214 pointe alors du doigt la conquête des nouveaux marchés à l’étranger ainsi qu’une communication mensongère qui vante un poulet français « bien élevé ». L’association a porté plainte auprès du procureur de Brest contre l’élevage, le responsable de l’élevage et la coopérative Yer-Breizh.

Elle renouvelle également sa demande au groupe LDC et à la région Bretagne de s’engager à respecter les critères minimaux de l’European Chicken Commitment, afin de faire reculer le désastre généré à tous niveaux par l’élevage intensif. Une pétition pour interpeller l’entreprise directement est disponible sur le site de l’association.

Enfin, L214 appelle à la mobilisation pour faire face à la direction de l’abattoir de Chateaulin et interpeller les élus de Rennes, ce mardi 25 avril.  


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Société
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