La gauche de Mayotte face à Wuambushu
Dans un contexte de tension, les militants progressistes se sentent isolés et incompris par les directions des partis qu’ils représentent. De quoi réduire l’influence de leurs idées sur un territoire où la gauche parlementaire peine à trouver ses marques.
dans l’hebdo N° 1763 Acheter ce numéro

© Alain JOCARD / AFP.
"Nous sommes le département le plus pauvre de France. On devrait tous être en faveur d’une politique sociale. » Attablé à la terrasse d’une boulangerie à Koungou, au nord de Mayotte, le porte-parole de La France insoumise locale, Abdullah Mikidadi, déroule son programme progressiste pour Mayotte. Son aisance contraste avec sa dernière apparition télévisuelle sur Mayotte la 1re, le 21 avril dernier.
Peu avant le lancement de l’opération Wuambushu – qui ambitionne des expulsions massives et la destruction des bidonvilles –, le quinquagénaire était alors poussé à prendre position sur cette intervention. « Le groupe LFI a condamné Wuambushu. Êtes-vous aussi catégorique, au risque de vous mettre à dos les Mahorais ? », lui assène-t-on. Conscient des enjeux locaux, Mikidadi répond avec une certaine retenue : « On ne peut pas se positionner sur une opération dont on n’a pas les tenants et les aboutissants. » Cette absence de condamnation d’une opération militaro-policière, vue par la gauche hexagonale comme une énième attaque contre les droits des sans-papiers, est rapidement récupérée par Gérald Darmanin et dénoncée par Révolution permanente afin d’attaquer la gauche parlementaire.
Face au sentiment d’abandon et de désespoir d’une bonne partie de la population mahoraise, Wuambushu apparaît pour certains comme l’opération de la dernière chance. Selon les militants politiques locaux, s’y opposer frontalement relève d’un suicide politique. « Mikidadi n’a pas eu le choix. S’il se positionne contre, il est mort », nous indique en off une autre personnalité de la gauche locale. Le principal intéressé déplore cette polémique qui a provoqué un certain malaise au sein de la gauche. « Je n’ai jamais dit que je cautionnais Wuambushu. Il faut le dire à Darmanin. Ce truc-là est mort d’avance. Tout a été préparé en secret. Comment résoudre en quelques mois les problèmes accumulés pendant quarante ans ? », s’insurge-t-il.
Une gauche isoléeLoin d’être anecdotique, cette actualité illustre une partie des difficultés de la gauche mahoraise à s’exprimer d’une seule voix, en accord avec les directions des partis. Lesquels ne sont pas vraiment habitués à se déplacer à Mayotte pour échanger avec leur électorat. « On essaie de s’harmoniser, mais le problème vient aussi de nous. On doit se structurer pour accueillir les représentants dans de bonnes conditions », justifie Abdullah Mikidadi. Invisible dans les déplacements des personnalités de gauche, Mayotte ne compte également aucun élu de ce spectre idéologique au sein de l’Assemblée nationale ou du Sénat. Malgré une présence notable du Parti socialiste sur l’île par le passé, son influence et ses militants sont désormais réduits à
Il vous suffit de vous inscrire à notre newsletter hebdomadaire :
Pour aller plus loin…

Hervé Berville : la mer et (surtout) au-delà

SNU : vague de départs au cabinet de la ministre Prisca Thévenot

Antisémitisme : « Marine Le Pen a réussi son coup, plus rien n’accroche »
