Un budget 2025, entre aveuglement et renoncements
Austéritaire donc contre-productif, injuste socialement, tournant le dos à la transition écologique : le budget du gouvernement Barnier est un énorme erreur.
Le projet de loi de finances 2025 n’a pas été adopté en première lecture par une Assemblée nationale divisée. Il y a de bonnes raisons à cela : le budget du gouvernement Barnier présente des lacunes majeures qui le rendent inacceptable par la majorité des élus. En premier lieu, les apprentis sorciers de Bercy s’obstinent à répéter la même erreur que dans le passé : l’austérité budgétaire inscrite dans le budget, supposée réduire le déficit public, aura un effet contraire à l’objectif recherché.
D’après l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), rattaché à Sciences Po, la diminution annoncée des dépenses publiques de plus de 40 milliards d’euros réduira de moitié la croissance en 2025. Ce qui entraînera une forte diminution des recettes fiscales, et empêchera la baisse du déficit budgétaire. La réduction des dépenses publiques que le gouvernement veut imposer dès 2025 est deux fois plus importante que la potion requise par les règles européennes, pourtant contestables, qui correspond à une réduction progressive de 18 milliards pendant sept ans du déficit public, pour ramener celui-ci à 3 % du PIB, contre 6,1 % en 2024.
Michel Barnier a manqué l’occasion d’une réforme progressiste de la fiscalité.
La deuxième grande faille du projet de budget 2025 est son caractère profondément injuste. Contrairement aux promesses de Michel Barnier, les classes populaires et moyennes ne seront pas épargnées par l’austérité budgétaire, avec le report de l’indexation des retraites sur l’inflation, des prélèvements comme la taxe sur l’électricité, et la réduction du remboursement par la Sécurité sociale des consultations médicales.
De plus, le projet de budget ne contient pas de mesures véritables en faveur de la justice fiscale, pourtant énoncée comme prioritaire par le premier ministre, puisque les nouvelles taxes proposées sur les grandes entreprises et sur les hauts revenus seront faibles et temporaires. Michel Barnier a manqué l’occasion d’une réforme progressiste de la fiscalité, souhaitée par la grande majorité des contribuables ; en commençant par mettre fin aux cadeaux fiscaux distribués sans contrepartie par Macron aux entreprises et aux super-riches, et qui contribuent au déficit budgétaire à hauteur de 60 milliards par an.
Autre renoncement de Michel Barnier : celui-ci avait déclaré devant le Parlement vouloir « mettre au même niveau la dette financière et la dette écologique ». Or le projet de budget contredit cette promesse. Beaucoup de dispositifs fondamentaux pour la transition écologique subissent une baisse drastique. Ainsi, MaPrimeRénov’ perd 1 milliard d’euros de crédits et l’électrification des véhicules 500 millions d’euros ; le fonds vert, destiné à aider les collectivités locales à financer leurs projets vertueux, voit son enveloppe de 1 milliard d’euros pratiquement divisée par deux.
L’argent public pour la transition devrait être sanctuarisé. Moins on le fait, plus les coûts de réparation futurs seront élevés. Dans dix ans, on comprendra que ce budget, qui risque d’être adopté en force avec l’article 49.3 de la constitution, est une énorme erreur.
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