IA : pour une Europe leader

Alors que Trump annonce un plan ambitieux de 500 milliards de dollars pour financer le développement de l’intelligence artificielle, Macron organise un sommet de l’IA sans grande ambition. La France et l’Europe doivent se réveiller.

Pierre Jacquemain  • 7 février 2025
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IA : pour une Europe leader
© Maximalfocus / Unsplash

Trump joue à nous faire peur. Comme il fait peur au Canada, au Mexique, au Groenland, au Panama. Et maintenant à Gaza pour des raisons différentes. Sur le plan économique, la menace que fait peser le nouveau président américain sur l’Union européenne – qu’il exècre -, avec la taxation des produits importés, est sans doute préoccupante. D’autant plus préoccupante si nous ne lui imposons pas une riposte à la hauteur. Parce que nous en avons les moyens si elle est anticipée, et concertée par les États membres.

Nous autres, Européens, ferions mieux d’observer ce qu’est le trumpisme.

La perspective d’une taxe contre taxe, pour plus protectionniste-que-moi-tu-meurs, serait en réalité perdant-perdant pour les européens et les américains. Nul n’y a intérêt en réalité. Et Trump le sait. Rappelons-nous, quand même, qu’il y a une part de bluff dans Trump. Les annonces de taxes à l’endroit du Mexique et du Canada n’ont duré que quelques heures. Trump affirme avoir gagné une négociation qui n’existe pas, ou qui préexiste à son investiture. Le Mexique a déjà envoyé ses troupes à la frontière américaine par le passé. À la demande même des États-Unis. Quant aux Canadiens, ce qu’il dit en avoir obtenu avait déjà été annoncé en décembre dernier, à savoir un plan frontalier du pays voisin à hauteur de 1,5 milliards d’euros.

Sur le même sujet : Dossiert : l’IA, cheval de Troie du techno-libéralisme

Bien sûr il ne faut pas sous-estimer, le Trump. Mais nous autres, Européens, ferions mieux d’observer ce qu’est le trumpisme. Parce que, contrairement à l’Union européenne, le trumpisme – au-delà du danger fasciste qu’il représente – est un plan stratégique à long terme. Il a une visée stratégique. Ce que n’a pas, ou plus, l’Union européenne. Qu’avons-nous à opposer aux 500 milliards de dollars d’investissement promis par Trump sur l’intelligence artificielle, le projet « Stargate » ? Pas grande chose. Ou peut-être un sommet français avec les amis de Trump en guest star (1).

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Du 6 au 11 février, à Paris.

Voilà ce que nous devons imposer à Trump : d’autres géants du numérique à l’échelle européenne.

Pourquoi l’Europe se montre-t-elle si timide devant les géants du numériques, les GAFAN/GAFAM, les Musk, Bezos et Zuckerberg ? « S’il s’avère qu’Elon Musk utilise sa plateforme pour mettre en avant certaines opinions ou certains partis politiques et qu’il utilise ses algorithmes pour le faire, il est en infraction », commente ainsi, faussement naïve, la nouvelle ministre du numérique française, Clara Chappaz. Parce qu’il est avéré que ces patrons, acquis à la cause de Trump, sont une menace pour nos démocraties. Les ingérences sont prouvées.

Sur le même sujet : Dossier : Intelligence artificielle, des rêves et des dérives

Qu’attendons-nous pour interdire leurs plateformes en Europe ? Qu’attendons-nous pour développer et maîtriser nos propres outils numériques ? Voilà ce que nous devons imposer à Trump : d’autres géants du numérique à l’échelle européenne. Nous avons un savoir-faire majeur en matière d’intelligence artificielle en Europe. Il faut aller plus loin encore. Devenir leader pour mieux contrôler ses effets indésirables, mieux réguler sa pratique et en favoriser plus encore ses innovations.

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