Retraites, assurance-chômage, santé : trois sujets brûlants pour plus d’égalité

Huit ans de macronisme auront eu raison du mythe égalitaire français. Baisse des APL, réformes de l’assurance-chômage, RSA sous condition, etc. Les coups de semonce ont été nombreux. Passage en revue de trois sujets chauds.

Pierre Jequier-Zalc  • 17 septembre 2025 abonné·es
Retraites, assurance-chômage, santé : trois sujets brûlants pour plus d’égalité
Place de la République, à Paris, le 10 septembre 2025, lors du mouvement "Bloquons tout".
© Maxime Sirvins

Le « moment de vérité » de François Bayrou, le 15 juillet dernier, a marqué un tournant. Sa conférence de presse, décrite comme un « musée des horreurs » par les syndicats, a scellé la fin de son gouvernement. Autant de mesures austéritaires et inégalitaires qu’il n’a pas pu assumer jusqu’au bout. Désormais, son nouveau premier ministre doit choisir : apporter un peu d’égalité ou tomber.

La réforme des retraites

Sans abrogation, ce gouvernement tombera.

S. Binet

Deux ans et demi après sa mise en place au forceps, le recul de l’âge légal reste au cœur de la colère. Une réforme jugée injuste : elle frappe d’abord les plus précaires, en particulier les femmes et les métiers pénibles. « Il faut revenir sur la réforme de 2023 », martèle Marylise Léon (CFDT), après sa rencontre avec Sébastien Lecornu. « Sans abrogation, ce gouvernement tombera », avertit Sophie Binet (CGT) à la sortie de Matignon. Bayrou avait tenté de calmer la contestation avec une consultation sans suite. Sébastien Lecornu, lui, n’aura pas cette latitude. Les huit syndicats, divisés hier, se retrouvent unis le 18 septembre. Comme un air de revanche et la volonté de panser une plaie encore ouverte.

Sur le même sujet : Ce que « Bloquons tout » peut construire en vue du 18 septembre

L’assurance-chômage

Cette réforme est tout simplement inacceptable.

D. Gravouil

À l’inverse des retraites, la question de l’assurance-chômage ne mobilise guère. Pourtant, les quatre réformes successives de la Macronie ont profondément durci l’accès aux droits et réduit les indemnités. Elles ont fragilisé les chômeurs, accentuant la précarité, sans effet tangible sur l’emploi. Le 15 juillet dernier, Bayrou annonçait une cinquième réforme. Toujours la même logique : indemnisation plus faible, droits plus difficiles à ouvrir. Une politique inégalitaire alors que plus de 210 milliards d’euros sont distribués aux entreprises chaque année sans aucune contrepartie.

Sur le même sujet : Dossier : Assurance-chômage, le casse du gouvernement

Le projet dévoilé cet été inquiète les syndicats : remise en cause de la rupture conventionnelle, allongement de la durée minimale d’emploi pour ouvrir des droits, absence de revalorisation des allocations. Objectif : 4 milliards d’euros d’économie par an. « Cette réforme est tout simplement inacceptable », alerte Denis Gravouil (CGT). Mais Matignon est resté muet face aux critiques. Si le dossier passe au second plan derrière retraites et fiscalité, il n’en reste pas moins explosif.

Franchises médicales et aide médicale d’État

Il est hors de question que les décrets sur le doublement des franchises médicales et sur l’AME reviennent.

D. Gravouil

Avant de quitter Matignon, le gouvernement Bayrou avait tenté de faire passer deux décrets controversés : doubler la franchise médicale et réduire les soins compris dans l’aide médicale d’État. Des mesures suspendues grâce à la mobilisation syndicale et à la chute du gouvernement, mais qui pourraient ressurgir. Elles reposent sur un postulat : faire porter l’effort budgétaire sur les malades – souvent les plus âgés – et sur les étrangers.

Sur le même sujet : Dossier : Pour sa survie, Bayrou cible les sans-papiers

Le patron du Medef, Patrick Martin, a déjà plaidé pour le doublement du forfait : « On n’a plus les moyens de payer », se justifie-t-il, préférant cibler patients et étrangers plutôt que les entreprises. La CGT a mis en garde Lecornu. « Il est hors de question que les décrets sur le doublement des franchises médicales et sur l’AME reviennent », a lancé Denis Gravouil lors de sa rencontre avec le premier ministre. Celui-ci aurait alors simplement répondu : « J’espère qu’on aura l’occasion d’en reparler. » Pour avoir cette occasion, il devra mettre en place une politique « de rupture » par rapport à celle mise en place depuis huit ans. Une politique fondée sur l’égalité.

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