Rester mobilisé·es en solidarité avec le peuple palestinien
Alors que les crimes se poursuivent en Palestine malgré le cessez-le-feu annoncé, 85 organisations appellent à une mobilisation nationale ce 29 novembre à Paris. Anne Tuaillon, présidente de l’Association France Palestine Solidarité, à l’origine de cet événement, rappelle l’urgence de la situation.

© Maxime Sirvins
Depuis plus de deux ans, partout en France comme en Europe et dans le monde, des manifestations sont organisées pour exiger un cessez-le-feu et l’arrêt du génocide à Gaza et l’application des droits fondamentaux du peuple palestinien.
De nombreuses capitales européennes ont connu des manifestations extrêmement importantes. C’est dans cet objectif que l’Association France Palestine Solidarité (AFPS) (1) a proposé à toutes celles et ceux qui se mobilisent depuis plus de deux ans d’organiser ensemble, de la manière la plus unitaire possible, une manifestation nationale sur la base de mots d’ordre simples et clairs basés sur le droit international.
L’AFPS est sociétaire de la société coopérative d’intérêt collectif (Scic) Politis.
Ce samedi 29 novembre, Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien, ce sont donc 85 organisations – associations, syndicats et partis politiques – qui appellent à converger de toute la France pour manifester à Paris en solidarité avec le peuple palestinien.
Nous serons massivement rassemblé·es ce jour-là pour exiger un cessez-le-feu définitif et la fin du génocide, des sanctions contre Israël, la fin de l’occupation, de la colonisation et de l’apartheid et par-dessus tout, l’autodétermination du peuple palestinien – qui doit en être son propre acteur – et le droit au retour des réfugiés palestiniens.
Certain·es pourraient penser qu’après le cessez-le-feu entré en vigueur le 10 octobre 2025 et le vote du Conseil de sécurité instituant lui aussi un cessez-le-feu et un prétendu plan de paix, les choses sont en train de s’apaiser et qu’il n’y a plus lieu de se mobiliser. C’est précisément ce piège qu’il faut éviter. En 44 jours, Israël a violé 497 fois le cessez-le-feu, ce sont au moins 342 personnes qui ont été assassinées par Israël lors des bombardements quotidiens – qui n’ont jamais cessé – et sous les balles de snipers et plus de 800 qui ont été blessées.
La bande de Gaza est toujours occupée pour près de 60 % de son territoire, Israël bloque toujours très massivement l’aide humanitaire et la population vit dans des conditions extrêmement précaires, sous tentes ou dans les ruines de leurs maisons alors que toutes les infrastructures ont été pulvérisées. Gaza a été rendu délibérément inhabitable par Israël, on y compte près de 70 000 morts depuis le début du génocide et plus de 170 000 blessés ! Et ça continue !
Il convient de rappeler qu’un pays n’a aucun droit d’aller tuer dans un pays voisin, c’est une violation du droit international.
Par ailleurs, la situation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est n’a jamais connu un tel niveau de violence que ce soit de l’armée d’occupation ou des colons, une telle répression, un tel nettoyage ethnique : depuis octobre 2023 plus de 1 000 assassinats, des centaines de maisons détruites, des villages incendiés, plus de 10 000 arrestations arbitraires, des prisons transformées en zones de non droit où la torture, les agressions sexuelles et le viol sont systémiques, des milliers d’hectares volés, près de 10 000 oliviers saccagés en octobre, le bétail volé ou massacré, les puits remplis de béton, près de 50 000 Palestinien·nes déplacé·es de force… crime de guerre après crime de guerre, crime contre l’humanité après crime contre l’humanité… et le régime d’apartheid qui se renforce avec de nouvelles lois comme celle adoptée en première lecture par la Knesset prévoyant la peine de mort pour les seul·es Palestinien·es.
Tout cela sans que les États membres de l’ONU, à de rares exceptions près, ne prennent la moindre mesure, la moindre sanction pour faire pression sur Israël afin que cette guerre totale qu’il mène contre le peuple palestinien cesse enfin.
C’est dans ce contexte terrible où jamais le peuple palestinien n’a subi de telles agressions, où son avenir n’a jamais été aussi incertain et où l’objectif d’Israël de le faire disparaître est apparu au grand jour, que le Conseil de sécurité de l’ONU a approuvé le 17 novembre le plan Trump. Un plan adopté en violation de la Charte des Nations unies qui est fondée sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Les Palestinien·nes n’ont pas eu leur mot à dire et leur droit à autodétermination ne figure que pour qu’il soit clair qu’il est reporté sine die.
Ce plan de mise sous tutelle économique, politique et administrative du peuple palestinien, qui entérine la mainmise des États-Unis sur la terre de Palestine, est une véritable forfaiture. Aucune mesure contre le génocide, contre la violence des colons, aucun compte n’est demandé à Israël qui a parfaitement compris que l’impunité dont il jouit depuis le premier jour lui était garantie pour longtemps encore.
Israël a parfaitement reçu le message : dès le lendemain de ce vote, il a procédé à une recrudescence des bombardements à Gaza faisant des dizaines de morts chaque jour et aussi sur le Liban permettant ainsi également qu’on parle encore moins des violations du cessez-le-feu à Gaza. Il y a la même stratégie qu’à Gaza : sur 20 km tous les villages ont été rasés et des dizaines de milliers de Libanais ne peuvent pas rentrer chez eux et il y construit un mur de béton. Il convient de rappeler qu’un pays n’a aucun droit d’aller tuer dans un pays voisin, c’est une violation du droit international et on aimerait entendre la France s’en offusquer.
Au lieu de voter cette résolution, les membres du Conseil de sécurité avaient une alternative : l’application de celle votée par l’Assemblée générale du 18 septembre 2024 qui exige des États membres qu’ils prennent des sanctions contre Israël afin qu’il mette fin à l’occupation et à la colonisation illégales du territoire qu’il occupe depuis 1967.
Et qu’ils prennent des mesures contre leurs ressortissants ou entreprises qui contribuent à maintenir les situations illégales d’occupation et de colonisation, conformément à l’avis de la Cour internationale de justice du 19 juillet 2024. C’est ce que les États membres du groupe de La Haye proposent de faire, mais la France préfère poursuivre sa complicité avec les crimes d’Israël plutôt que de respecter les résolutions qu’elle a pourtant votées.
Qu’est-ce qu’un État dont la terre est colonisée et dont le peuple vit sous occupation militaire et sous un régime d’apartheid ?
La France et l’Union européenne ont tout laissé entre les mains de Trump et courent après les Américains alors que l’Union européenne et ses États membres ont les leviers pour faire pression sur Israël, à commencer par la suspension de l’accord d’association qui les lient et l’arrêt du commerce des armes. La vérité est que la plupart d’entre eux s’y refusent, Israël étant un allier auquel ils continuent à accorder une totale impunité quel que soit le niveau des crimes commis y compris le plus grave, le crime de génocide.
Pour la France, toutes les options peuvent être examinées sauf celle qui amène à reconsidérer ses relations avec Israël et à prendre des sanctions contre cet État multicriminel. C’est ce qui l’a amené à reconnaître l’État de Palestine, une décision certes positive et demandée depuis des décennies par le mouvement de solidarité, mais une décision bien tardive et sans aucune conséquence sur la vie des Palestinien·nes. Qu’est-ce qu’un État dont la terre est colonisée et dont le peuple vit sous occupation militaire et sous un régime d’apartheid ?
Autant de faits qui se suffisent à eux-mêmes pour que la poursuite de la mobilisation en solidarité avec la Palestine s’impose comme une évidence, pour que justice lui soit rendue, parce qu’il n’y a pas et il n’y aura pas de paix sans justice.
Nous ne nous laissons pas abuser ni par l’écran de fumée du plan Trump, ni par les faux cessez-le-feu ou les condamnations de pure forme et sans lendemain de nos dirigeants. Face à celles et ceux qui voudraient faire croire que le « conflit israélo-palestinien » est en voie de résolution, nous portons la responsabilité d’imposer le droit à Israël et à nos gouvernements. Après bientôt 80 ans de Nakba continue et de nettoyage ethnique, après des décennies de colonisation, après plus de deux ans de génocide, le peuple palestinien est debout face à l’occupant, il refuse de partir, de disparaître. Il sait qu’il n’est pas seul.
Pour toutes ces raisons, nous serons extrêmement nombreuses et nombreux samedi 29 novembre, place de la République à Paris, pour qu’on nous entende jusqu’en Palestine !
Des contributions pour alimenter le débat, au sein de la gauche ou plus largement, et pour donner de l’écho à des mobilisations. Ces textes ne reflètent pas nécessairement la position de la rédaction.
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