Pride, le film

Pride, fierté, associé immédiatement à la pride prônée par les gays, qui a donné le nom au défilé annuel le dernier samedi de juin.

Mais la fierté dont il est question dans le film est celle des exclus, des rejetés, des gays, londoniens, mais aussi des mineurs, du Pays de Galles, dans leur lutte et leur longue grève de 1984-1985.

Perline  • 5 septembre 2014
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Pride, le film

Et la rencontre de ces deux groupes, si opposés dans de si nombreux domaines, se joue entre frictions et clashs. Une histoire vraie, tout est vrai, même si scénarisé.

Un film sans faute[^2].

Un film en dentelle, tout en finesse, qui réussit l’exploit d’aborder, à la fois, la situation, en 1984, des homosexuels et des mineurs en grève tous deux face à l’inflexible Margaret Thatcher ; de faire rire aux éclats et pleurer à chaudes larmes, de décrire toutes les attitudes d’exclusion, de rejet de l’autre, quel qu’il soit.

De montrer la faiblesse de la représentation des lesbiennes dans les groupes militants, et la force des femmes de mineurs.

Une histoire vraie, celle d’un groupe de militants gays et lesbiens qui décide de soutenir les mineurs en grève parce qu’ils ont le même ennemi, les dirigeants de l’État.

Mais comment une telle histoire a-t-elle pu rester inconnue jusqu’à ce film ?

« Les mineurs ont perdu la grève, personne n’aime se souvenir des luttes qui se finissent mal. Et il n’y a rien sur Internet, donc la mémoire est perdue », explique le scénariste Stephen Beresford. Comment a-t-il eu, lui, connaissance de cet épisode ?

«~Alors que je me disputais avec mon petit ami, il y a vingt ans, j’avais alors vingt ans et lui trente, il me parla de soutenir les mineurs en grève, je lui répondis : « pourquoi soutenir des gens qui nous détestent ? ». Il me rétorqua « je vais te raconter une histoire »~».

Stephen Beresford - Scénariste de Pride, lors de l'avant-première à Paris, le 3 septembre 2014.
{Photo Perline}

Chacun s’y reconnaîtra, on y trouve tous les rôles, toutes les attitudes, on y verra des proches, des amis, des ennemis, on y verra la violence des rejets, on y verra les changements d’attitude, ceux qui ont trouvé qu’un gay peut être utile, même si on déteste les gays. On y verra des déchirures, familiales, des fils et des mères éloignés, de la confiance en soi qui croît, le sida.

Des acteurs fantastiques, des scènes de toute beauté, beaucoup de plans rapprochés, qui contribuent à cette proximité avec les personnages, et une scène de théâtre, le tartinage des sandwich dans la cuisine – c’est le premier film écrit par Stephen Beresford, scénariste de théâtre – d’une intensité et d’une profondeur, dans tous ses détails, hors du commun, admirablement mise en valeur par le réalisateur Matthew Warchus et les deux acteurs Bill Nighy et Imelda Staunton.

Matthew Warchus - Réalisateur de Pride, lors de l'avant-première à Paris, le 3 septembre 2014.
{Photo Perline}

Dans un tout autre style, ce film parle, tout comme Qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu de la facilité à exclure l’autre, à toujours trouver une raison pour rejeter l’autre, pour que toute différence soit négative.

La standing ovation de plusieurs minutes à la fin de la projection de l’avant-première, à Paris le 3~septembre, laisse augurer d’un succès qui ira bien au-delà des groupes directement impliqués dans le film.

En ces temps de désespoir politique, on pourra y trouver matière à continuer ses luttes, quelles qu’elles soient car, comme le dit Stephen Beresford, « Ce n’est pas parce qu’une lutte n’est pas victorieuse qu’il faut se décourager et arrêter de lutter ».

Dont acte.

[^2]: Excepté l’affiche, dont le mégaphone parasite le mot « pride ». Mais comment peut-on laisser passer un si mauvais et contre-productif graphisme ?

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