Le loup se plaît en France

Présents dans une vingtaine de départements, les loups, contrairement aux ours, progressent sur le territoire, au grand bénéfice de l’équilibre naturel des forêts.

Claude-Marie Vadrot  • 28 août 2008 abonné·es

Le 15 août, les ours ont encore fait la une de la presse et provoqué une nouvelle diatribe des « anti » parce que l’un de ces plantigrades a été percuté par un minibus roulant trop vite sur la nationale 20, en Ariège. L’animal, qui tournait le dos à Lourdes, est pourtant sorti miraculeusement indemne de cet accident, et les occupants du véhicule n’ont pas été blessés. Il ne s’agissait que de l’une des quelque 30 000 collisions entre une voiture et un animal sauvage qui se produisent chaque année parce que les pouvoirs publics se refusent à investir dans les passages pour animaux. L’année dernière, l’ourse Franka avait été tuée par une voiture, après avoir été sciemment effrayée par des chasseurs.
Bien que n’étant plus qu’une vingtaine à errer dans les Pyrénées françaises, les ours font toujours beaucoup parler d’eux, et il n’est pas certain que la récente intervention en leur faveur de Carla Bruni leur soit d’une grande aide. On sait, depuis la mise en place d’un plan ours à la demande de François Mitterrand dans les années 1980, que l’onction présidentielle n’est pas une garantie, au contraire.

En revanche, les loups, discrets et probablement plus prudents pour traverser les routes, continuent à s’installer tranquillement en France, à la grande satisfaction des naturalistes, et ce sans aucune intervention paraprésidentielle. Depuis leur arrivée (officielle) « à pattes » d’Italie en 1992 dans le parc national du Mercantour, malgré les embûches, les tirs illégaux, les empoisonnements et les éliminations légales, ils progressent sur le territoire : ils étaient deux, ils sont maintenant au moins 150, et, grâce aux mesures de protection offertes à de nombreux bergers, la prédation (toujours remboursée) sur les moutons diminue lentement ; elle n’a toujours aucune commune mesure avec les dégâts (plus de 100 000 brebis par an) causés par les chiens errants.

D’après les documents d’observation de l’hiver dernier publiés il y a quelques jours par l’association Ferus, qui regroupe les défenseurs des ours, des loups et des lynx, les loups seraient plus ou moins régulièrement présents dans une vingtaine de départements. Ce qui signifie qu’après avoir colonisé l’arc alpin jusqu’en Savoie, ces bêtes d’origine italienne sont parvenues d’une part jusqu’aux Pyrénées et d’autre part jusque dans l’Aude, le Tarn et le Cantal. Des observateurs dignes de foi en ont même repéré en Lozère, en Ardèche et en Haute Loire, y compris dans la célèbre région de la « bête du Gévaudan », dont le récit alimente toujours les phobies des chasseurs et des éleveurs. Alors qu’il est établi depuis des années que cette « bête » n’a jamais existé et que les 150 morts et 160 blessés qui lui ont été officiellement attribués pendant trois ans à partir de 1764 sont probablement des crimes non élucidés. Situation de panique aggravée avec l’exploitation de l’angoisse des habitants, par la royauté et les catholiques, pour faire du loup un « protestant » hérétique en cette région déchirée par une longue guerre de religion.
Quelles que soient les histoires « terribles » (toujours) colportées par des bergers et des chasseurs tentant d’obtenir de nouvelles autorisations de tir d’élimination dans les négociations menées sous l’égide du ministère de l’Écologie avec les associations de protection, la reconquête d’une grande partie du territoire français par le loup semble inéluctable, ce qui ne pourra que contribuer à l’équilibre naturel des cervidés, dont la prolifération menace à la fois les cultures et la régénération naturelle des forêts.

Écologie
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