Notre-Dame-des-Landes: les opposants mobilisent samedi

A quelques kilomètres de la ZAD, les anti-aéroport ont prévu de bloquer la circulation sur deux axes routiers (Nantes-Vannes et Nantes-Rennes), le 27 février, afin de réclamer à nouveau l’abandon du projet d’aéroport.

Chloé Dubois (collectif Focus)  • 25 février 2016
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Notre-Dame-des-Landes: les opposants mobilisent samedi
© Photo : AFP / LOIC VENANCE - le 23/02/2016

Le bruit de la résistance n’en finit plus de résonner sur la «Zone à défendre». Samedi 27 février, différents mouvements opposés au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, dont l’ACIPA, principale association anti-aéroport, et Attac France organisent un nouveau rassemblement citoyen. L’objectif ? Dénoncer les destructions environnementales et sociales à échelle nationale, mais aussi les problèmes démocratiques et climatiques cristallisés par la lutte contre le projet de la société Aéroport du Grand Ouest (AGO), filiale de Vinci, sur la ZAD.

Les instigateurs de cette manifestation espèrent mobiliser plusieurs dizaines de milliers de personnes afin de consolider le mouvement, déjà devenu un symbole en matière de résistance. Selon Geneviève Coiffard, membre d’Attac, il s’agit de prouver au gouvernement la capacité des «zadistes» à bloquer les accès à Notre-Dames-des-Landes.

Samedi matin, les tracteurs et les vélos seront donc invités à bloquer une des voies rapides en direction de Nantes, où se tiendra également une prise de parole. Simultanément, une grande marche sera organisée plus au sud, pour les piétons. Les manifestants pourront alors se rejoindre quelques kilomètres plus loin et participer à l’installation d’une vigie. Celle-ci doit permettre d’assurer une permanence afin d’alerter les opposants au projet en cas d’attaque de la ZAD ou de commencement de travaux.

Pour la militante d’Attac, qui admet, en conférence de presse, la complexité de ce projet de manifestation, il s’agit d’organiser une action d’envergure :

Il ne s’agit pas de faire compliqué pour le plaisir, mais de démontrer notre capacité à bloquer les accès de la ZAD à l’endroit même où les travaux sont censés commencer. Le rapport de force existe, et nous travaillons à le renforcer.

À ses côtés, Mikel Hiribarren, membre de la Confédération paysanne, appelle le monde paysan à participer à ce rassemblement afin de «se montrer solidaire» et de «lutter contre l’artificialisation des terres». Lorelei Limousin du Réseau Action Climat (RAC), a quant à elle demandé de la cohérence au gouvernement afin qu’il respecte les accords signés à l’issue de la conférence sur le climat :

Penser que nous pouvons repousser les limites de la biosphère au lendemain de la Cop 21 est incohérent. Il faut revoir l’ensemble des projets d’infrastructures et revenir sur les décisions prises il y plusieurs dizaines d’années ! Les engagements de François Hollande lors de la conférence sur le climat sont incompatibles avec le projet d’un aéroport à NDDL.

Dimanche dernier, plus de quarante personnalités ont signé l’appel «La France doit renoncer à construire l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes», initié par Mediapart, 350.org et Attac France. Ce jeudi 25 février, la pétition compte déjà plus de 15.000 signataires. Parmi eux, Giorgio Agamben, Virginie Despentes, Pierre Rabhi, Erri de Luca, Naomi Klein, Cyril Dion, Jean Jouzel ou encore Bill McKibben. Il y est notamment écrit :

L’engagement pris dans l’accord de Paris n’est pas compatible avec la construction d’un aéroport à Notre-Dame-des Landes sur près de 1.200 hectares de terres agricoles et de milieux naturels (qu’habitent de nombreuses espèces protégées), qui générerait un surcroît d’émissions par l’aviation, le bétonnage d’une des plus grandes zones humides du pays, et la destruction de fermes paysannes.

De même, Nicolas Haeringer, membre de 350.org interpelle sur la nécessité de geler les projets de constructions qui vont à l’encontre de ces accords : «Il est désormais indispensable d’entrer dans une phase de désobéissance climatique, et cela commence ce week-end.»

«L’arnaque» d’un référendum

Concernant la possibilité d’un référendum, Geneviève Coiffard se montre plus que réservée. Selon elle, la première réaction de l’ACIPA a été de s’interroger sur la légalité d’un tel procédé alors que des actions en justices sont toujours en cours. Mais un autre problème se pose, et il est «démocratique». Une semaine après les révélations du Canard Enchaîné, la militante dénonce une «arnaque» gouvernementale :

Pour répondre à une question par «oui» ou par «non», il faut que nous ayons des éléments sur lesquels nous appuyer. Or, nous en sommes empêchés. Alors comment voulez-vous que l’on croit à l’exigence démocratique d’un référendum.

Le lien entre la question climatique et celle de l’aménagement du territoire est d’ailleurs clairement démocratique selon Nicolas Haeringer, qui s’interroge sur la forme que pourrait prendre la tenue d’un tel référendum. Ironiquement, le jeune homme rappelle que si la véritable question est climatique, alors il conviendrait d’organiser un référendum mondial. La situation se complique…

Dates clefs des mobilisations à venir:

À Notre-Dame-des-Landes (44), le samedi 27 février, les opposants au projet d’aéroport ont décidé d’afficher leur refus déterminé face à l’expulsion, prononcée par le Tribunal Administratif de Nantes le 25 janvier, des onze familles résistantes et encore présentes sur la ZAD.

À Barjac (30), le lendemain, dimanche 28 février, les collectifs contre l’exploration et l’exploitation des pétrole et gaz de schiste et de couche manifesteront leur détermination à exiger une abrogation définitive de tout nouveau permis ou tout renouvellement de permis délivré aux compagnies pétrolières et gazières. En effet, le Tribunal Administratif de Cergy Pontoise a décidé le 28 janvier dernier d’annuler l’abrogation du permis de Montélimar accordé à Total, revenant sur l’abrogation annoncée par N. Sarkozy en 2011.

À Heathrow (aéroport londonien), 13 militants sont dans l’attente de leur verdict (ce 24 février) après qu’ils aient bloqué l’aéroport pour protester contre son expansion. Une action de solidarité avec ces militants, qui risquent jusqu’à 3 mois de prison, est prévue ce samedi 27 février.

Break Free – Libérons-nous des combustibles fossiles : au mois de mai, 350.org, Greenpeace International, Attac et de nombreuses autres organisations préparent une semaine de blocages d’infrastructures fossiles : mine de charbon en Allemagne et au pays de Galle, torchage de gaz au Nigeria, etc. Pour en savoir plus : http://fr.breakfree2016.org

Le mouvement de résistance mondiale sur le climat a déjà obtenu plusieurs victoires comme l’interdiction de la fracturation hydraulique en France en 2011, désengagement des trois plus grosses banques françaises sur les projets de développement basés sur le charbon du bassin de Galilée en Australie, l’abandon du projet de pipeline Keystone aux USA… Des victoires plus modestes gagnées localement par des mouvements citoyens, mais tout aussi importantes, comme l’abandon en 2014 d’un projet d’exploitation de gaz de schiste dans le village de Zurawlow en Pologne par Chevron, grâce à la mobilisation locale.

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