L’arnaque des colonies sauvages en Cisjordanie

Israël a adopté une loi légalisant les colonies « sauvages » installées en Palestine, pour mieux masquer sa politique « officielle » de colonisation.

Denis Sieffert  et  Adrien Monnanni  • 8 février 2017
Partager :
L’arnaque des colonies sauvages en Cisjordanie
© Photo : AHMAD GHARABLI / AFP

La Knesset israélienne a adopté lundi soir une loi autorisant la confiscation de terres appartenant à des propriétaires palestiniens en Cisjordanie. Emmenée par Naftali Bennet, ministre de l’Éducation et chef du parti d’extrême droite Foyer juif, cette « loi de régularisation » vise officiellement à trouver des « compromis » avec les propriétaires volés. Contre une compensation financière ou un autre terrain, ceux-ci devront s’engager à renoncer à toute poursuite judiciaire. Faisant écho à l’évacuation de la colonie d’Amona, la loi prévoit également la suspension, pendant un an, de tout ordre d’expulsion et de démolition des habitations construites illégalement sur des territoires palestiniens. Cinquante-cinq colonies sauvages, s’étalant sur 800 hectares, pourraient ainsi être « régularisées ».

Un vaste écran de fumée

La loi, avec laquelle le Premier ministre Benyamin Netanyahou a pris ses distances, apparaît cependant comme un leurre. Le texte a en effet suscité une réprobation internationale, mais le risque est évidemment que cette condamnation légitime la colonisation qu’Israël juge « légale ». Car, il faut le rappeler, ce sont toutes les colonies qui sont illégales au regard du droit international. On peut imaginer que la Cour suprême israélienne invalide la loi de lundi et que la décision sera saluée par la communauté internationale, non sans hypocrisie. On aura ainsi minimisé l’intensification de la colonisation officielle menée par l’État hébreu. Galvanisé par l’entrée de Donald Trump à la Maison Blanche, Israël a annoncé la construction de 2 500 logements en Cisjordanie ainsi qu’un autre projet de 3 000 constructions. Un vaste plan auquel s’ajoutent les « milliers de logements » prévus à Jérusalem-Est, dont la construction aboutirait à l’enterrement de la solution à deux États. L’affaire des colonies sauvages aura alors agi comme un écran de fumée.

Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

« Les chefs d’État pourraient être accusés de complicité de génocide »
Interview 20 mai 2025 abonné·es

« Les chefs d’État pourraient être accusés de complicité de génocide »

Damien Scalia fait partie des Juristes pour le respect du droit international (Jurdi), une association qui a mis en demeure la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne pour leur inaction face au génocide en cours à Gaza.
Par Hugo Boursier
Agnieszka Holland : « Il y a une crise de l’espoir en Europe »
Entretien 19 mai 2025 abonné·es

Agnieszka Holland : « Il y a une crise de l’espoir en Europe »

Au lendemain du premier tour des élections présidentielles en Pologne, où l’extrême droite a remporté plus de 20 % des voix, la cinéaste franco-polonaise livre à Politis son analyse.
Par Pauline Mussche
Portugal : comment l’extrême droite a imposé ses thèmes
Entretien 19 mai 2025 abonné·es

Portugal : comment l’extrême droite a imposé ses thèmes

Chercheuse à l’Institut des sciences sociales de l’Université de Lisbonne, Sofia Serra-Silva analyse les raisons de la montée de l’extrême droite et de l’effondrement de la gauche au Portugal, qui n’est plus une exception à la droitisation de la politique européenne.
Par Pablo Castaño
Dans les urnes ou dans les têtes, le crescendo de l’extrême droite européenne
Analyse 19 mai 2025 abonné·es

Dans les urnes ou dans les têtes, le crescendo de l’extrême droite européenne

Malgré la victoire du candidat europhile en Roumanie, les élections du 18 mai confirment l’enracinement de l’extrême droite dans le paysage politique européen. En Pologne, au Portugal ou en Roumanie, ses succès — électoraux ou idéologiques – interrogent sur les moyens de l’endiguer.
Par Juliette Heinzlef