Macron : après les provocations, les (mauvaises) excuses
Malgré les polémiques, le président de la République « assume » la plupart de ses déclarations. Ce n’est pas le cas de son porte-parole ou de la communication du gouvernement, contraints de ramer sur les plateaux télévisés.
Être cultivé et parler comme les Français, un sacré bordel
O n peut être cultivé et parler comme les Français », arguait Christophe Castaner le jeudi 5 octobre sur Radio Classique. Le porte-parole du gouvernement cherchait à justifier les propos d’Emmanuel Macron qui affirmait que certain feraient mieux de chercher du travail « au lieu de foutre le bordel », tandis que les salariés de GM&S l’interpellaient. Et puis, parce que lorsque l’on touche le fond, on peut continuer de creuser, le porte-parole du gouvernement affirme qu’on « peut aussi avoir l’objectif en politique […], c’est le cas d’Emmanuel Macron, d’arrêter la langue de bois et d’oser nommer les choses ».
Bonus
« Alors oui, le président de la République a utilisé dans une conversation privée avec le président de la région Aquitaine un mot qui provoque le débat, mais est-ce qu’il n’y a pas de nombreux Français qui pensent cela ? » Une discussion privée, vraiment ? Parce que la séquence, captée par France 3 Limousin avec une caméra 360°, montre que la discussion se déroulait devant plusieurs caméras.
La fainéantise extrême
On l’a vu durant le mois de septembre, les fainéants sont de sortie. Le discours d’Emmanuel Macron à Athènes, lorsqu’il affirmait ne rien céder « ni aux fainéants, ni aux cyniques, ni aux extrêmes », a provoqué quelques tollés. Tentant de calmer le jeu, Christophe Castaner est intervenu sur CNews et Europe 1. « Je suis assez surpris que l’on préfère s’attacher uniquement à la question des fainéants. Est-ce que ce serait une insulte plus brutale que d’être extrémistes ? » Habile manœuvre de langage ? Pour détendre l’atmosphère, le porte-parole s’est même risqué à un trait d’humour : « Moi, franchement peut-être parce que j’ai un tropisme du Sud, je me dis que fainéants, c’est quelque chose qui sonne mieux. » Explication ? Le Président visait les « rois fainéants » en la personne de ses prédécesseurs ? Nous passerons sur le fait que la phrase faisait référence à l’avenir et que Macron fut une des personnalités de l’ancien quinquennat, les justifications fusent. Quoi que dise Macron, son porte-parole est là.
#greve12septembre La pancarte du jour. Merci Macron ! #Faineants pic.twitter.com/x3IYqzO0xE
— Michel Soudais (@msoudais) September 12, 2017
L’humour raciste présidentiel
En visite dans un centre de sauvetage du Morbihan au mois de juin 2017, le Président se laisse aller, plaisantant sur le kwassa-kwassa, un type de canot de pêche utilisé dans les Comores. « Le kwassa-kwassa, il pêche peu. Il amène du Comorien », rigole Emmanuel Macron sur une séquence isolée par l’émission « Quotidien ».
« Le kwassa-kwassa pêche peu ! Il amène du Comorien ! » #Quotidien pic.twitter.com/hXKRC2vWx9
— Quotidien (@Qofficiel) June 2, 2017
« Un trait d’humour malheureux », argue l’Élysée. Il semblerait malheureux de rigoler des 12 000 personnes qui ont péri de noyade suite aux traversées en kwassa-kwassa pour joindre Mayotte. Ultime justification de l’Élysée : on fait « un mauvais procès » au Président qui a « toujours eu une position très claire, faite de fermeté et d’humanité, sur le sujet des migrations dans l’océan Indien, qu’il connaît bien car il s’est rendu à La Réunion et à Mayotte avec des prises de position sur ce problème ». Car, oui, un voyage de campagne dans une île africaine vous protège du racisme, sachez-le.
Le respect du costard
Le 27 mai 2016, en déplacement pour lancer son mouvement En marche !, le ministre de l’Économie est interpellé par un militant CGT. Après quelques minutes de discussion, Emmanuel Macron perd son sang-froid. « Vous n’allez pas me faire peur avec votre T-shirt. La meilleure façon de se payer un costard, c’est de travailler. » L’ancien inspecteur des finances et banquier d’affaires sait de quoi il parle. Quelques jours plus tard, cité par l’AFP, il revient sur cette polémique. « Je n’ai ni mépris ni démagogie, mais j’attends aussi d’eux [les salariés, NDLR] qu’ils respectent les représentants des pouvoirs publics : on ne tutoie pas un ministre, on ne l’invective pas. » À l’opposé, la réponse « spontanée » du futur Président témoignerait, selon lui, de son respect envers ce manifestant contre la loi travail.
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D’autres expressions choquantes émaillent le parcours politique du chef de l’État. On se souvient des abattoirs Gad où travaillent « une majorité de femmes » qui, selon lui, « sont pour beaucoup illettrées ». Plus récemment, il évoquait des gares où « ceux qui ont réussi » côtoient « ceux qui ne sont rien ». La prétendue « pensée complexe » du Président comporte manifestement une bonne dose de mépris de classe.
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