Laurent Coq : Le clavier joue avec les mots

Avec Kinship, le pianiste Laurent Coq relie ceux qui nourrissent sa musique depuis un quart de siècle.

Lorraine Soliman  • 8 novembre 2017 abonné·es
Laurent Coq : Le clavier joue avec les mots
© photo : Antonio Porcar Cano

Laurent Coq fait partie des jazzmen qui font bouger leur sphère, dans la durée et l’excellence. Avec la sortie de Kinship sur le label participatif Jazz&people [1], il ne déroge pas à la règle.

Kinship, au sens strict, désigne le lien de parenté, mais il doit ici être entendu dans son acception la plus généreuse. Laurent Coq, en effet, signe un hommage aussi spontané que possible à l’ensemble de ses compagnons de jazz, représentés ici par les guitaristes Sandro Zerafa et Ralph Lavital, les saxophonistes Walter Smith III, Jérôme Sabbagh, Mark Turner et Miguel Zenon, les batteurs Guilhem Flouzat et Damion Reid, les pianistes Bruce Barth et Guillermo Klein, et la chanteuse Laurence Allison. Dans un souci d’équité, il a demandé à chacun d’eux de lui indiquer un terme qui symbolise la musique qu’ils jouent et composent, soit autant de titres qui désigneront, au hasard, les onze morceaux de Kinship.

Un curieux procédé de composition, qui veille à respecter l’entremêlement des influences et des amitiés nouées au fil d’une vie de musique intercontinentale, évitant toute hiérarchie a posteriori. « Light », « Honest », « Pleasure », « Mistery », « Organized », « Sincerely », « Life »… La sobriété des mots offerts contraste joliment avec la sophistication éclatante de la musique de Laurent Coq, idéalement accompagné par le jeune Californien Joshua Crumbly à la contrebasse et le batteur Johnathan Blake.

Dans ce disque giratoire et familier, le pianiste se retourne, certes, sur son passé (parisien, new-yorkais, latino, plus récemment antillais), mais il n’en poursuit pas moins son exploration jusqu’au-boutiste des formes vagabondes d’un idiome intangible nommé jazz. Le retour au format canonique du trio piano-contrebasse-batterie, laissé de côté (discographiquement parlant) depuis Spinnin’, en 2005, semble exprimer une volonté d’ancrage dans la « tradition », comme pour mieux non pas la dépasser, mais la laisser vivre au gré des expériences et des rencontres.

Ce qui se joue dans Kinship est de l’ordre de l’enchevêtrement fécond bien plus que de l’accumulation. Dans cet hommage original, on entend le bouillonnement des dialogues essentiels de Laurent Coq, porté par un nouveau trio qui, on l’espère, entretiendra longtemps sa complicité. Merci aux quelque 120 citoyens mélomanes et engagés grâce auxquels ce beau disque a pu voir le jour.

[1] Voir Politis n° 1476 ou ici.

Kinship, Jazz&people/Pias.

Musique
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